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UNE POLITIQUE LINGUISTIQUE AXÉE SUR LE FRANÇAIS

Impératif français devant le Comité des langues officielles

Le fédéral doit développer une politique linguistique axée sur le français

Impératif français invite le Comité des langues officielles à faire de la question démographique un facteur important d’évaluation de la vitalité des communautés francophones du Canada. « Le gouvernement fédéral et ses officines cachent constamment le fait que la situation des communautés francophones du Canada se détériore. Or, en ignorant délibérément le problème, le gouvernement du Canada se soustrait en même temps à l’obligation logique de prendre les mesures pour y remédier » a déclaré le président de l’organisme Jean-Paul Perreault.

« La démographie des communautés est centrale dans le devenir des communautés, a souligné le président. Faut-il rappeler que le droit à l’enseignement en français au Canada, par exemple, n’est pas absolu, mais bien tributaire du critère de la loi des nombres ? »

Le président d’Impératif français a invité le Comité à donner suite aux propositions suivantes en vue d’améliorer la situation du français au Canada :

  1. Cesser de cacher les données sur la démographie des communautés, mais au contraire, donner à ce critère une place centrale dans l’ensemble de mesures qui seront retenues pour évaluer la vitalité des communautés ;
  2. Proposer une politique linguistique qui accorderait à la réparation une place prépondérante en vue de tenter de compenser les communautés pour les cent ans d’histoire où les droits des francophones ont été bafoués ou limités dans toutes les provinces à majorité anglaise;
  3. Réaligner la politique fédérale en la basant non plus sur le bilinguisme, mais sur la défense et la promotion du français au Canada;
  4. Harmoniser la politique linguistique fédérale avec celle du Québec en vue de soutenir le gouvernement du Québec dans ses efforts de francisation du Québec ;
  5. élaborer une stratégie nationale en faveur du français au Canada dans laquelle les gouvernements du Québec et fédéral seraient des partenaires égaux.

Ci-dessous, le mémoire qu’Impératif français devait présenter au Comité des langues officielles de la Chambre des Communes le 14 décembre 2006. à la demande du Comité, sa présentation est reportée à plus tard.

Tableau 1 – Alphabétisme

Population de plus de 15 ans (en %) ne fréquentant pas l’école à plein temps
selon la langue maternelle et deux niveaux de scolarité, Canada,
Recensement de 1996

Canada %

Anglais %

Français %

Autre %

Inférieure à la 9e année

14

8

20

23

études universitaires

22

23

18

24

Source : Enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes – Alphabétisme et alphabétisation des francophones au Canada, page 16

ANGLICISATION DU CANADA !

Tableau 2 : ASSIMILATION AU CANADA

langue maternelle langue d’usage

écart

écart (%)

anglais

17 521 896

20 011 538

+ 2 489 642

+14,2

français

6 782 294

6 531 375

– 250 919

– 3,7

autres

5 334 850

3 096 117

-2 238 733

– 42,0

total

29 639 040

L’unilinguisme anglais progresse au Canada !

Tableau 3 : CONNAISSANCE DU FRANçAIS OU DE L’ANGLAIS

Parle uniquement
(1)

Langue d’usage
(2)

Langue maternelle
(3)

écart
(1 – 3)

Rapport (%)
(1/3)

anglais

20 014 645

20 011 538

17 521 896

+ 2 492 749

114,2

français

3 946 525

6 531 375

6 782 294

– 2 835 769

58,2

Tableau 4 : éVOLUTION DE LA POPULATION CONNAISSANT UNE SEULE LANGUE

1991

2001

écart

anglais

18 106 760

20 014 645

+ 1 907 885

français

4 110 300

3 946 525

– 163 775

Tableau 5 : Anglicisation des minorités francophones hors Québec,
1971 et 2001

Français

langue maternelle

(1)

Français

langue d’usage

(2)

Pertes

(en %)

(1)-(2)/(1)

Total hors Québec

1971

2001

926 295

980 272

675 925

612 990

27

37

Terre-Neuve-et-Labrador

1971

2001

3 610

2 348

2 295

991

36

58

Île-du-Prince-édouard

1971

2001

7 360

5 885

4 405

2 818

40

52

Nouvelle-écosse

1971

2001

39 585

35 377

27 220

19 789

31

44

Nouveau-Brunswick

1971

2001

214 720

239 357

199 080

217 773

7

9

Ontario

1971

2001

482 350

509 264

352 465

307 297

27

40

Manitoba

1971

2001

60 485

45 932

39 600

20 892

35

55

Saskatchewan

1971

2001

31 795

18 633

15 930

4 805

50

74

Alberta

1971

2001

46 750

62 241

22 700

20 672

51

67

Colombie-Britannique

1971

2001

38 035

58 893

11 505

16 902

70

71

Territoires

1971

2001

1 610

2 344

720

1 054

55

55

Source : Statistique Canada, Les langues au Canada : recensement de 2001, 2004.

Tableau 6 : Pouvoir d’assimilation de l’anglais au Québec, 1991 et 2001

Anglais

langue maternelle

(1)

Anglais

langue d’usage

(2)

Gains

(en %)

(2)-(1)/(1)

Total Québec

1991

2001

626 202

591 379

761 805

746 892

22

26

Région métropolitaine de Montréal

1991

2001

461 114

431 827

598 186

587 924

30

36

Outaouais

1991

2001

43 255

47 833

48 490

54 022

12

13

Source : Office québécois de la langue française, Les caractéristiques linguistiques de la population du Québec : profil et tendances, 1991-2001, 2005.

FONCTION PUBLIQUE CANADIENNE

Tableau 7 : Fonction publique fédérale
Comparaison des postes bilingues au Québec et en Ontario

Postes exigeant le bilinguisme

Population francophone ou anglophone

Rapport

Ontario

2 099

510 000 francophones

1/242

Québec

12 063

590 000 anglophones

1/49

Tableau 8 : Fonction publique fédérale – Postes unilingues au Canada

Français

Anglais

Rapport

Postes unilingues

7 490

84 200

1 pour 11

Population francophone ou anglophone au Canada

6 782 294

17 521 896

1 pour 2,5

Rapport

1 pour 905

1 pour 208

Tableau 9 : Fonction publique fédérale
Postes désignés unilingues en pourcentage – Ensemble canadien

Français

Anglais

Rapport

Proportion de la population canadienne de langue maternelle…

22,9 %

59 %

1 pour 2,5

Pourcentage de postes désignés unilingues

4 %

51 %

1 pour 12,75

Sommaire

Impératif français est un groupe de promotion et de défense de la langue et de la culture d’expression française qui oeuvre sur la scène outaouaise, québécoise, canadienne et dans le monde. Notre mission consiste à promouvoir la langue et la culture françaises et à dénoncer les reculs du français. Impératif français s’appuie sur un vaste réseau de collaborateurs bénévoles. Notre site Internet compte des milliers de pages. Nous sommes ici aujourd’hui pour vous assister dans votre travail de réflexion portant sur la vitalité des communautés linguistiques minoritaires au Canada.

La question soulevée par le Comité est d’une importance capitale : à notre avis, au Canada, où le français est la langue de la minorité, la vitalité des communautés francophones est la pierre d’assise sur laquelle repose la politique linguistique canadienne dont l’objectif avoué est d’assurer la progression, vers le statut d’égalité et d’usage, du français et de l’anglais au Canada. Si la politique linguistique du Canada ne s’appuie pas sur les communautés linguistiques, elle deviendrait une chose abstraite qui ne justifierait pas qu’on y investisse des centaines de millions depuis quelque trois décennies.

Mais comment mesure-t-on la vitalité des communautés ? Si bien des unités de mesure peuvent être retenues, tel le niveau d’éducation, le niveau de vie, le PIB par habitant comparé à celui de la majorité, le nombre et l’importance des institutions publiques et privées, l’influence économique, politique, voire militaire d’un groupe minoritaire, il reste que la question fondamentale est celle des nombres : combien de personnes appartiennent à ce groupe minoritaire, ce groupe minoritaire s’accroît-il ou se réduit-il, a-t-il la capacité d’intégrer de nouveaux arrivants ? Quel est son poids par rapport à celui de la majorité ? Ce dernier se maintient-il, s’accroît-il ?

Impératif français entend soumettre au Comité que cette donnée, qu’on escamote de manière régulière dans les officines du gouvernement fédéral, constitue la plus importante de votre étude et la base sur laquelle devront reposer vos recommandations.

Et c’est pour cela que nous allons nous y attarder.

Ainsi, dans le présent mémoire, nous vous rappellerons

  1. la fragilité du français au Canada et au Québec,
  2. nous vous inviterons à réévaluer le rôle du gouvernement fédéral en matière linguistique de manière à prendre un parti réel pour l’avancement du français au Canada, dans l’objectif, un jour peut-être, d’atteindre l’objectif linguistique fédéral qui est l’égalité de statut et d’usage du français et de l’anglais au Canada.

Introduction

L’étude de Statistique Canada Enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes – Alphabétisme et alphabétisation des francophones au Canada affirme que, selon le recensement de 1996, « la proportion de francophones qui n’ont pas au moins neuf années d’études – le seuil traditionnel de l’analphabétisme fonctionnel – est de 2,6 fois plus élevée que celle des anglophones. Au niveau des études universitaires, l’écart est moins considérable mais les francophones accusent néanmoins un retard de 5 points de pourcentage par rapport aux anglophones…»

Tableau 1 – Alphabétisme
Population de plus de 15 ans (en %) ne fréquentant pas l’école à plein temps
selon la langue maternelle et deux niveaux de scolarité, Canada,
Recensement de 1996

Canada %

Anglais %

Français %

Autre %

Inférieure à la 9e année

14

8

20

23

études universitaires

22

23

18

24

Source : Enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes – Alphabétisme et alphabétisation des francophones au Canada, page 16

Source : Enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes – Alphabétisme et alphabétisation des francophones au Canada, page 16

Le Comité des langues officielles a demandé que notre présentation porte sur l’alphabétisme. Ce sujet nous apparaît pertinent puisque les statistiques du dernier recensement fédéral confirment le recul du français et de sa connaissance au Canada, et la défrancisation des francophones par leur anglicisation, leur assimilation. Il n’est donc pas étonnant que l’analphabétisme fonctionnel des francophones soit si important.

Ce mémoire traitera des principales causes du retard de l’alphabétisme des francophones au Canada : banalisation et infériorisation du français, bilinguisme soustractif, défrancisation, anglicisation, érosion culturelle, assimilation dont les conséquences sont connues. « infériorité dans maintes situations », inégalité de chance, « difficultés de communication », exclusion, « retrait social ». Selon l’étude de Statistique Canada, « les personnes ainsi marginalisées ont moins facilement accès au marché du travail ; elles sont généralement cantonnées dans des emplois précaires, mal rémunérés et dans des conditions de travail difficiles. »

1. Sur la fragilité du français au Canada

En attendant les données du recensement de 2006, qui devraient confirmer les tendances lourdes en défaveur du français qu’ont révélé tous les recensements depuis 1951, voici un rappel des chiffres de celui de 2001. Certaines vérités méritent d’être répétées notamment lorsque les efforts pour les occulter sont nombreux et efficients.

A. Langue maternelle

au Canada, entre 1951 et 2001, la proportion de Canadiens de langue maternelle française est passée de 29 à 23 % ;
à l’extérieur du Québec, entre 1951 et 2001, la proportion de Canadiens de langue maternelle française a décru, passant de 7,3 % en 1951 à 4,4 % en 2001 ;
au Québec, la proportion de francophones de langue maternelle française a également chuté un peu : elle est passée de 82,5 % en 1951 à 81,4 % en 2001, une perte de près de 1 %.

B. Langue d’usage

Sur le plan de la première langue d’usage utilisée à la maison, les choses ne vont pas mieux. à noter que les statistiques sur la langue d’usage ne datent que de 1971 et ont été introduites dans le questionnaire du recensement suite à une recommandation de la Commission Laurendeau-Dunton qui a estimé que les statistiques sur la langue maternelle était une génération en retard sur la réalité. Donc, qu’en est-il de la situation du français au Canada, comme langue d’usage :

au Canada, entre 1971 et 2001, la proportion de Canadiens – incluant le Québec – parlant le français le plus souvent à la maison est passé de 25,7 % en 1971 à 22 % en 2001 ;
au Québec, entre 1971 et 2001, cette proportion s’est améliorée passant de 80,8 % à 83,1 % ;
hors Québec, entre 1971 et 2001, le pourcentage de Canadiens qui ont le français comme principale langue d’usage à la maison est passé de 4,3 % en 1971 à 2,7 %, trente ans après l’adoption de la Loi sur les langues officielles.

Tableau 2 : ASSIMILATION AU CANADA

langue maternelle langue d’usage

écart

écart (%)

anglais

17 521 896

20 011 538

+ 2 489 642

+14,2

français

6 782 294

6 531 375

– 250 919

– 3,7

autres

5 334 850

3 096 117

-2 238 733

– 42,0

total

29 639 040

C. Connaissance des langues

Tableau 3 : CONNAISSANCE DU FRANçAIS OU DE L’ANGLAIS

Parle uniquement
(1)

Langue d’usage
(2)

Langue maternelle
(3)

écart
(1 – 3)

Rapport (%)
(1/3)

anglais

20 014 645

20 011 538

17 521 896

+ 2 492 749

114,2

français

3 946 525

6 531 375

6 782 294

– 2 835 769

58,2

La connaissance du français a reculé un peu au Canada au cours du dernier demi-siècle :

  • Ainsi, en 1951, 31,9 % de la population canadienne avait une connaissance du français. Cette proportion est aujourd’hui de 31 % ;
  • En contrepartie, la connaissance de l’anglais, pour la même période est passée de 79,3 % à 86 %.

Tableau 4 : éVOLUTION DE LA POPULATION CONNAISSANT UNE SEULE LANGUE

1991

2001

écart

anglais

18 106 760

20 014 645

+ 1 907 885

français

4 110 300

3 946 525

– 163 775

D. Les transferts linguistiques

Si le français était en bonne santé, au Canada comme au Québec, il attirerait son poids démographique de transferts linguistiques. Ainsi, au Canada, au total, le français devrait bénéficier de 22 % des transferts linguistiques effectués et l’anglais de 67,5 % si on prend comme critère de base la langue parlée à la maison. Or, on l’a vu, alors que l’anglais gagne du terrain au Canada, le français en perd.

Tableau 5 : Anglicisation des minorités francophones hors Québec,
1971 et 2001

Français

langue maternelle

(1)

Français

langue d’usage

(2)

Pertes

(en %)

(1)-(2)/(1)

Total hors Québec

1971

2001

926 295

980 272

675 925

612 990

27

37

Terre-Neuve-et-Labrador

1971

2001

3 610

2 348

2 295

991

36

58

Île-du-Prince-édouard

1971

2001

7 360

5 885

4 405

2 818

40

52

Nouvelle-écosse

1971

2001

39 585

35 377

27 220

19 789

31

44

Nouveau-Brunswick

1971

2001

214 720

239 357

199 080

217 773

7

9

Ontario

1971

2001

482 350

509 264

352 465

307 297

27

40

Manitoba

1971

2001

60 485

45 932

39 600

20 892

35

55

Saskatchewan

1971

2001

31 795

18 633

15 930

4 805

50

74

Alberta

1971

2001

46 750

62 241

22 700

20 672

51

67

Colombie-Britannique

1971

2001

38 035

58 893

11 505

16 902

70

71

Territoires

1971

2001

1 610

2 344

720

1 054

55

55

Source : Statistique Canada, Les langues au Canada : recensement de 2001, 2004.

Au Québec, si le français était en bonne santé, il attirerait 83,1% des nouveaux locuteurs et l’anglais 10,5 % si on prend les statistiques de la langue d’usage. Or, en 2001, l’anglais avait attiré 55 % des locuteurs qui ont l’adopté comme nouvelle langue d’usage contre 45 % pour le français. Dans la région de Montréal, la situation est encore plus dramatique : l’anglais y a attiré 65 % des locuteurs qui ont adopté une nouvelle langue d’usage et le français 35 %.

Tableau 6 : Pouvoir d’assimilation de l’anglais au Québec, 1991 et 2001

Anglais

langue maternelle

(1)

Anglais

langue d’usage

(2)

Gains

(en %)

(2)-(1)/(1)

Total Québec

1991

2001

626 202

591 379

761 805

746 892

22

26

Région métropolitaine de Montréal

1991

2001

461 114

431 827

598 186

587 924

30

36

Outaouais

1991

2001

43 255

47 833

48 490

54 022

12

13

Source : Office québécois de la langue française, Les caractéristiques linguistiques de la population du Québec : profil et tendances, 1991-2001, 2005.

Or, de ces données, une étude publiée par l’Office de la langue française il y quelque temps concluait :

Au total, malgré la vitalité nouvelle que manifeste le français au Québec, il y a eu plus – beaucoup plus, même – de nouvelles substitutions réalisées sur le territoire québécois en faveur de l’anglais qu’en faveur du français entre 1971 et 2001. Autrement dit, en chiffres absolus tout comme en chiffres relatifs, la vitalité générale de l’anglais a progressé davantage au Québec que celle du français sur l’ensemble de la période à l’étude.

E – D’autres indices peu encourageants

D’autres données nous amènent à conclure que la situation démographique du français au Canada est fragile :

  • le taux de fécondité des femmes francophones est en baisse;
  • le vieillissement de la population francophone progresse à un rythme nettement plus rapide que celui de la population anglophone en raison du taux de natalité des francophones et du facteur assimilation ;
  • en conséquence, plusieurs provinces ont vu une réduction de leurs effectifs francophones : lors du recensement de 2001, on a constaté que la population qui avait le français comme principale langue d’usage à la maison a diminué à Terre-Neuve, à l’Île-du-Prince-édouard, en Nouvelle-écosse, en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan, en Alberta, en Colombie-Britannique, aux Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. Au Canada, moins le Québec, la population francophone a perdu 63 000 locuteurs depuis 1971, alors que la population anglophone a cru de 5,5 millions de locuteurs. Les démographes prévoient depuis quelque temps déjà que la population francophone du Québec subira une baisse dans de prochains recensements.

Tableau 7 : Fonction publique fédérale
Comparaison des postes bilingues au Québec et en Ontario

Postes exigeant le bilinguisme

Population francophone ou anglophone

Rapport

Ontario

2 099

510 000 francophones

1/242

Québec

12 063

590 000 anglophones

1/49

Tableau 8 : Fonction publique fédérale – Postes unilingues au Canada

Français

Anglais

Rapport

Postes unilingues

7 490

84 200

1 pour 11

Population francophone ou anglophone au Canada

6 782 294

17 521 896

1 pour 2,5

Rapport

1 pour 905

1 pour 208

Tableau 9 : Fonction publique fédérale
Postes désignés unilingues en pourcentage – Ensemble canadien

Français

Anglais

Rapport

Proportion de la population canadienne de langue maternelle…

22,9 %

59 %

1 pour 2,5

Pourcentage de postes désignés unilingues

4 %

51 %

1 pour 12,75

2. Les actions du gouvernement fédéral

Les francophones du Canada jouissent de plusieurs droits qui leur ont été octroyés par la constitution canadienne et qui auraient dû garantir la pérennité des communautés francophones : on pense évidemment à la Charte des droits et libertés, à la Loi fédérale sur les langues officielles, et des lois provinciales, comme la Loi sur les langues officielles au Nouveau-Brunswick, la Charte de la langue française au Québec, la Loi sur les soins de santé en français en Ontario, sans compter le Renvoi à la Cour suprême qui a reconnu quatre principes non écrits de la Constitution, dont celui de la protection des minorités.

Pourquoi ces garanties juridiques ne sont-elles pas traduites par des gains sur le plan démographique pour les francophones?

Essentiellement parce que les garanties juridiques sont restées au pire lettres mortes, au mieux ont été appliquées de manière inadéquate. Ainsi, dans toutes les provinces à majorité canadienne-anglaise des centaines de francophones ont perdu leur droit à l’enseignement en français pendant que leurs parents francophones avaient recours aux plus hautes instances juridiques du pays pour assurer la mise en oeuvre de leur droit à l’enseignement en français et à la gestion scolaire.

En 2004, devant ce comité, Mme Madeleine Chevalier, présidente de la Fédération nationale des Conseils scolaires francophones affirmait :

Certes, depuis 1982, nous comptons sur les droits scolaires garantis par la Charte, et vous savez combien il en a coûté à nos communautés francophones et acadiennes pour arracher devant les tribunaux la pleine reconnaissance de ces droits. Il a fallu trois jugements clés de la Cour suprême du Canada, l’arrêt Mahé en 1990, le renvoi manitobain en 1993 et l’arrêt Arsenault-Cameron en 2000, pour forcer les gouvernements des provinces et territoires à concéder la gestion scolaire à la minorité francophone. Pendant ce temps, l’assimilation maintenait le chantier ouvert il y a un siècle par les différentes interdictions qui ont condamné l’instruction en français à disparaître ou à vivoter dans l’ensemble du Canada.

Pour sa part, le gouvernement fédéral n’a jamais appliqué de manière adéquate sa propre législation sur les langues officielles et a ainsi nui, de manière systématique, aux francophones du Canada..

Ainsi :

  • tous les rapports du Commissariat aux langues officielles sont remplis de manquements à la Loi qui pénalisent de manière systémique les francophones du pays; encore dans son dernier rapport, le Commissariat rapporte que 86 % des plaintes déposées en vertu de la Loi sur les langues officielles proviennent des francophones;
  • les dernières interventions du Commissariat rappellent le gouvernement à l’ordre : l’anglais est toujours la langue de travail dans la fonction publique fédérale au Nouveau-Brunswick et le gouvernement défavorise les francophones en déménageant les sièges sociaux d’organisation dans des milieux unilingues anglais, comme ce fût le cas pour la Commission canadienne du tourisme qui brime à la fois les droits des fonctionnaires de travailler en français et celui des contribuables francophones de se faire servir dans leur langue;
  • dans la région de la capitale fédérale, le français ne se porte pas mieux au gouvernement fédéral. Ainsi, dans sa dernière étude sur « l’égalité de statut et d’usage de l’anglais et du français dans la fonction publique fédérale au siège social du gouvernement, le Commissariat aux langues officielles a conclu que le français était toujours sous-utilisé par rapport à l’anglais. C’est ainsi que le Commissariat a établi que les anglophones bilingues utilisent le français 13 p. 100 du temps par opposition aux francophones bilingues qui, eux, utilisent l’anglais 54 p. 100 du temps ; que 78 p. 100 des documents de travail sont rédigés en anglais par les répondants bilingues francophones, comparativement à 22 p. 100 en français pour des répondants bilingues anglophones et que 34 p. 100 des francophones de la région de la capitale fédérale, titulaires d’un poste bilingue, ne se sentent pas libres de rédiger des documents dans la langue officielle de leur choix, comparativement à 5 p. 100 pour les anglophones. Le Commissariat n’a pas dit que la situation était différente d’une rive à l’autre.
  • et au Québec, l’anglais est surreprésenté dans la fonction publique fédérale. C’est ainsi que le gouvernement fédéral y a désigné 60 % de ses postes bilingues pour desservir 10 % de la population québécoise qui est anglophone; le même ratio appliqué au Nouveau-Brunswick se traduirait par une bilinguisation de 180 % des postes de la fonction publique fédérale; de plus, le siège social du gouvernement fédéral est tellement anglophone, que les fonctionnaires fédéraux du Québec doivent correspondre en anglais avec Ottawa, selon une autre étude du Commissariat aux langues officielles;

Conclusion et recommandations

Impératif français est convaincu que la politique linguistique canadienne passe par la vitalité des communautés francophones du Canada, incluant celle du Québec, et que la démographie est un facteur déterminant qui doit être considéré à sa juste valeur. En effet, sans nombre, qu’advient-il de la communauté et de ses institutions ? En Saskatchewan, en 2001, 5 000 francophones disaient avoir le français comme principale langue d’usage à la maison. Comment dans ces conditions maintient-on les écoles francophones ouvertes, les bureaux gouvernementaux qui doivent offrir des services en français à cette population, les centres culturels et garderies, etc.

Au Québec, les gouvernements provinciaux successifs ont pris le parti d’adopter des mesures législatives et politiques en vue d’y protéger et promouvoir la langue et la culture françaises. Tout n’est pas parfait, mais la politique a quand même donné sur le plan démographique quelques résultats. Il nous faut être prudents, puisque les démographes prédisent une baisse de la population francophone de cette province au cours des prochains recensements.

Au Canada, les gouvernements successifs se sont lancés dans une politique qui repose sur l’existence de deux minorités linguistiques au Canada, ce qui est une aberration rejetée même par l’Organisation des Nations unies. Le 7 mai 1993, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies a conclu « que les anglophones au Canada ne pouvaient être considérés comme une minorité linguistique…»

Mais il y a pire : au gouvernement fédéral, et dans toutes ses officines, on s’accorde pour camoufler l’état des communautés francophones du Canada dans les provinces à majorité anglophone, comme s’il s’agissait là d’un problème qui ne devait jamais être abordé. Ainsi, il est à peu près impossible, à quelqu’un qui lit un rapport annuel du Commissariat sur les langues officielles, de savoir laquelle des deux langues connaît le plus de difficulté au Canada. Dans ces rapports on y lit des euphémismes tels que celui-ci tiré du dernier rapport annuel : comme (et je cite)

  • L’observateur un tant soit peu attentif découvre vite que la dualité linguistique n’est toujours pas véritablement intégrée à la culture organisationnelle de la plupart des institutions publiques (du gouvernement fédéral). En matière de service au public, par exemple, on constate un plafonnement, et même, dans certains cas, une détérioration de la qualité du service. Similairement, en ce qui concerne la langue de travail, on semble incapable de franchir de nouveaux seuils de rendement, si bien qu’on ne saurait encore parler d’égalité de traitement des deux groupes linguistiques.

Or, on l’a vu tantôt, la vaste majorité des plaintes déposées auprès du Commissariat proviennent des francophones. Incidemment, le Commissariat aborde, dans un chapitre de son dernier rapport annuel, la question de la vitalité des communautés linguistiques minoritaires. Mais ne propose pas la démographie comme un critère précis de mesure. Il y tient une langue de bois qui en fait un candidat, encore pour l’an prochain, au prix Citron d’Impératif français.

La démographie n’est pas l’unique mesure pour évaluer la vitalité d’une communauté. Ainsi, au Nouveau-Brunswick, d’où vient le député Jean-Claude D’Amours, le secteur culturel bat son plein et exporte : Marie-Jo Thério, Wilfred LeBouthiller, Antonine Maillet, récemment l’Ode à l’Acadie et j’en passe, tous ces artistes témoignent de l’immense potentiel artistique de l’Acadie. Mais le nombre de francophones qui a le français en partage y est en baisse.

Impératif français invite donc le Comité à innover et à donner suite aux recommandations suivantes :

  • Mettre sur la table, sous la lumière crue des projecteurs, la question des nombres.

    Lorsque le Plan Dion a été publié, Impératif français avait plaidé pour que l’un des critères d’évaluation du Plan soit la question des nombres. En effet, il apparaît logique qu’une politique linguistique destinée à soutenir les communautés francophones ait comme résultat l’augmentation de leur nombre au cours d’une période précise. Mais ce critère n’a pas été retenu. Pourtant, le droit le plus fondamental des communautés francophones du Canada est tributaire de la démographie. L’article 23 (3) de la Constitution de 1982 stipule que, et je cite : Le droit reconnu aux citoyens canadiens par les paragraphes (1) et (2) de faire instruire leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaire, dans la langue de la minorité francophone ou anglophone d’une province: a) s’exerce partout dans la province où le nombre des enfants des citoyens qui ont ce droit est suffisant pour justifier à leur endroit la prestation, sur les fonds publics, de l’instruction dans la langue de la minorité; b) comprend, lorsque le nombre de ces enfants le justifie, le droit de les faire instruire dans des établissements d’enseignement de la minorité linguistique financés sur les fonds publics.

    Pour sa part, dans son dernier rapport publié en mai 2006, le Commissariat aux langues officielles, invite le Conseil du trésor à réévaluer son Règlement sur les langues officielles – communications avec le public et prestation des services. Pourquoi ? Parce qu’en raison de la diminution des communautés, rappelle le Commissariat et je cite : Des bureaux du ministère du Développement social et du ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences ne sont plus tenus en vertu du règlement d’offrir des services bilingues à Labrador City, (T.-N.-L.), ni à Moose Jaw (Sask.) et à Sainte-Rose-du-Lac (Man.).

  • Proposer la mise en valeur de la « réparation » contenue dans la constitution canadienne pour les francophones du Canada et repris par la Cour suprême du Canada. Si les communautés francophones en sont rendues à des nombres si ténus, c’est parce que, notamment, pendant un siècle, toutes les provinces à majorité anglaise leur ont retiré leur droit à l’instruction en français. Le gouvernement a proposé des politiques de réparation pour les Japonais et le gouvernement précédent avait tout un programme évalué à plus d’un milliard de dollars pour soutenir les communautés autochtones. Pourquoi ne pas s’attarder à faire la même chose pour les francophones du Canada ?
  • Que le gouvernement du Canada se dote d’une politique linguistique basée sur la préservation et la promotion du français. Au gouvernement fédéral et dans ses institutions, on est tellement obnubilé par le bilinguisme, qu’on dit des sottises comme celle-ci que je prends dans le dernier rapport du Commissariat aux langues officielles, et je cite :

    Ce principe, (celui de la réparation) énoncé par la Cour suprême du Canada, signifie que les droits linguistiques prévus par la Charte doivent en outre servir de remède pour corriger l’érosion progressive des minorités parlant l’une ou l’autre langue officielle.

    Dans cet exemple, l’illogisme de la politique linguistique au gouvernement fédéral va jusqu’à faire croire que les communautés anglophones du Québec ont subi des avatars similaires à ceux des communautés francophones hors Québec, au point qu’il faudrait également leur accorder des « réparations ». Ce gommage systématique qui est fait des conditions historiques qui ont prévalu dans les communautés francophones du Canada et sur leur situation actuelle permet au gouvernement fédéral de s’esquiver quant à ses responsabilités envers les communautés. J’invite ici tous les membres à prendre connaissance du Rapport Simard publié vers 1999 et intitulé De la coupe aux lèvres : un coup de coeur se fait attendre. Il y est établi très clairement pour prendre connaissance de l’ampleur des torts qui ont été faits aux communautés francophones et des réparations qui seraient requises.

    Il est impératif qu’un plan de redressement, basé sur la notion de réparation, soit élaboré pour compenser les communautés francophones pour les politiques assimilatrices qu’elles sont subies pendant un siècle. Quarante ans de politique des langues officielles au Canada n’ont pas réussi, à elles seules, à stopper l’érosion des communautés.

  • Que le gouvernement fédéral harmonise le plus possible sa politique linguistique au Québec avec la Charte de la langue française, afin d’arrêter de travailler à l’anglicisation du Québec. Dans l’un de ses rapports, par exemple, le Commissariat aux langues officielles souligne que la fonction publique fédérale québécoise doit travailler en anglais avec le siège social fédéral, Ottawa et que cette situation contrevient au droit des fonctionnaires francophones du Québec à travailler dans leur langue sur le territoire du Québec.
  • Que les gouvernements fédéral et québécois participent, comme partenaires égaux, à une stratégie canadienne pour la sauvegarde et la promotion du français au Canada, basée sur l’appui aux communautés francophones du Canada. Il est en effet inusité que le Canada, un pays majoritairement anglophone, soit incapable de s’allier avec le seul état francophone en Amérique, le Québec, afin d’élaborer et de mettre en place une politique cohérente, et bien financée, en vue d’assurer la pérennité de la langue et la culture françaises au Canada. Il est plus que temps, alors que la démographie illustre clairement le déclin du français au Canada, que les deux états collaborent au profit du français sur le territoire canadien.

Source :
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