Vers une politique gouvernementale
de lutte contre le racisme et la discrimination
Pour la pleine participation des Québécoises et des
Québécois issus de l’immigration
Discrimination fondée sur la langue
Résumé du mémoire soumis par Impératif français à la
Commission de la culture de l’Assemblée nationale dans le cadre de la
consultation publique pour l’élaboration d’une politique gouvernementale de
lutte contre le racisme et la discrimination :
Les personnes immigrantes et les membres des communautés culturelles, tout
comme lensemble des travailleurs et travailleuses du Québec, sont victimes de
discrimination, allant jusquà lexclusion, lorsquils veulent exercer leurs
droits de travailler et de travailler en français.
En effet, en consultant maintes offres demploi dans les journaux, le
guichet-emplois et autres sites Internet doffres demploi, il est aisé de
constater que nombre demployeurs exigent ou considèrent comme un atout majeur
la connaissance de langlais de la part des candidats pour lattribution dun
emploi.
Sappuyant sur larticle 23 de la Déclaration universelle des droits de
lhomme des Nations unies : « toute personne a droit au travail (…) », sur
larticle 4 de la Charte de la langue française qui spécifie que : « les
travailleurs ont le droit d’exercer leurs activités en français », et ainsi que
sur larticle 26 de la Charte des droits et libertés du Québec : « nul ne peut
exercer de discrimination dans l’embauche (…) », Impératif français constate que
ces droits fondamentaux sont largement bafoués et non respectés par les
employeurs de lensemble du Québec.
Cette pratique dexclusion, cest-à-dire lexigence de la connaissance dune
autre langue que le français, « langue normale et habituelle du travail au
Québec », pour obtenir un emploi contribue à retarder grandement lintégration
des nouveaux arrivants à la société québécoise et leur participation à son
développement économique et culturel puisque le travail représente un facteur
clé dinsertion.
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INTRODUCTION
Impératif français
Impératif français organisme culturel de recherche et de communication voué à
la défense et à la promotion de la langue et de la culture dexpression
française a été fondé il y a 30 ans en Outaouais. Il regroupe les amis de la
langue et de la culture dexpression française désireux den favoriser
lépanouissement, tant au Québec, au Canada quau sein de toute la Francophonie.
Impératif français organise plusieurs activités ou y participe activement : la
Francofête, la Journée internationale de la Francophonie, la fête nationale du
Québec, LOutaouais en fête, les déjeuners-causeries dImpératif français, la
Semaine québécoise des rencontres interculturelles, la Semaine dactions contre
le racisme et autres.
Au cours des ans, Impératif français est devenu un intervenant majeur dans le
dossier linguistique grâce, entre autres, à son site Internet, référence et lieu
de rencontre reconnu de la Francophonie, et par ses interventions dans les
dossiers touchant la langue et la culture sur les plans local, régional,
national et international.
En raison de sa mission de rayonnement de la langue française dans toutes les
sphères dactivités humaines, Impératif français croit tout à fait naturel
dexprimer son avis sur la place des immigrants et des membres des communautés
culturelles dans la société québécoise et souhaite leur participation au
développement économique et culturel du Québec. Ainsi, Impératif français veut
mettre laccent sur la possibilité de travailler dans « la langue normale et
habituelle du travail au Québec », le français, puisque lintégration passe,
dans une très grande mesure, par la possibilité de travailler dans la société
daccueil.
Impératif français adhère entièrement au préambule de la Charte de la langue
française, sanctionnée le 26 août 1977 :
Langue distinctive d’un peuple majoritairement francophone, la langue
française permet au peuple québécois d’exprimer son identité.L’Assemblée nationale reconnaît la volonté des Québécois d’assurer la qualité
et le rayonnement de la langue française. Elle est donc résolue à faire du
français la langue de l’état et de la Loi aussi bien que la langue normale et
habituelle du travail, de l’enseignement, des communications, du commerce et des
affaires.
La Charte de la langue française spécifie à larticle 4 :
Les travailleurs ont le droit d’exercer leurs activités en français.
Or, ce droit fondamental est largement bafoué et non respecté par les
employeurs de lensemble du Québec.
SITUATION ACTUELLE
Dans la lutte que les langues se livrent, à lheure de
linternationalisation, la langue de travail est un enjeu majeur. à cause du
contexte nord-américain qui exerce de fortes pressions sur les milieux de
travail au Québec, la nécessité commande que lon travaille sans relâche à leur
francisation.
En consultant maintes offres demploi dans les journaux, le guichet-emplois
et autres sites Internet doffres demploi, il est aisé de constater que nombre
demployeurs exigent ou considèrent comme un atout majeur la connaissance de
langlais de la part des candidats pour lattribution dun emploi. Cette
discrimination à lembauche et à lemploi est présente partout au Québec et
généralisée en Outaouais et dans la région de Montréal.
Il devient ainsi urgent de donner un coup de barre à la francisation du monde
du travail, dautant plus que les forces économiques de la mondialisation
travaillent dans le sens inverse. Les entreprises qui sinstallent ici refusent
souvent de se plier à la langue de leurs travailleurs. à leurs yeux, dans le
contexte nord-américain, le Québec fait partie du marché anglophone. à cause
dune certaine forme de chantage à lemploi qui sexerce autant sur lemployé
que sur le gouvernement, ces entreprises ont beau jeu dessayer dimposer leur
langue.
Cette pratique dexclusion affecte lensemble des travailleuses et
travailleurs québécois et plus particulièrement les immigrants et les unilingues
francophones, désireux dobtenir un emploi répondant adéquatement à leurs
capacités et à leurs compétences.
LES IMMIGRANTS VICTIMES DE DISCRIMINATION
Définitions selon le MICC
La discrimination directe se présente lorsque la distinction, lexclusion ou
la préférence se fonde clairement sur lun des motifs interdits par la Charte
québécoise des droits et libertés de la personne.La discrimination indirecte provient de lapplication dune pratique en
apparence neutre et applicable à tous, mais qui a des effets préjudiciables
envers les groupes définis sur la base des motifs définis par la Charte. Aucune
intention de discriminer nest ici en cause. La discrimination provient de
normes et de pratiques arbitraires souvent héritées sans examen critique
dépoques anciennes. Lanalyse des pratiques est donc nécessaire pour la
dépister.On parle de discrimination systématique lorsque diverses pratiques, décisions
ou comportements se combinent à dautres pratiques au sein dun organisme ou à
celles dautres institutions sociales pour produire de la discrimination. Les
pratiques de discrimination sont alors des maillons de chaînes parfois longues
et complexes, où les pratiques discriminatoires se renforcent mutuellement. La
discrimination directe, la discrimination indirecte et la discrimination
systématique peuvent aussi se combiner et renforcer lexclusion, économique ou
sociale.
Plusieurs personnes immigrantes ou issues de communautés culturelles sont
victimes de discrimination et de préjugés quand ils désirent obtenir un emploi,
dabord en raison de préjugés racistes. Lobligation de connaître une autre
langue que la langue normale et habituelle de travail au Québec, en loccurrence
langlais, pour pouvoir travailler au Québec constitue, aux yeux dImpératif
français, une forme de discrimination que lon pourrait appelée, «
discrimination basée sur la langue ». Cette situation se traduit dans bien des
cas par lexclusion du marché du travail et comporte un obstacle de plus à
linsertion de ces personnes.
La personne immigrante qui ne peut travailler en raison de sa méconnaissance
de langlais est victime de discrimination et ne parvient pas à sintégrer à la
société québécoise ni à participer à son développement économique. Cette
situation frappe davantage les réfugiés car, le plus souvent, ils arrivent ici
sans ressources financières et souvent même sans connaître le français.
DOUBLE ET MêME TRIPLE OBSTACLE
Trop fréquemment, des professionnels diplômés dautres pays désirant exercer
leur profession au Québec sont déjà lésés par la non-reconnaissance de leurs
diplômes obtenus à létranger. Ils fournissent leffort dappendre le français
et par la suite se voient obligés, par les entreprises et autres employeurs, y
compris parfois le gouvernement du Québec lui-même, de maîtriser en plus
langlais pour travailler.
Cette exigence a pour effet, pour le moins, de retarder passablement leur
intégration à la société ou, au pire, de les décourager tout simplement devant
ce nouveau défi. Certains optent, malgré eux, pour un travail bien en deçà de
leurs capacités et de leurs compétences et moins bien payé que celui quils
auraient pu décrocher dans leur secteur dexpertise.
De plus, le Québec se prive, dans bien des cas, de travailleurs qualifiés
dont il aurait un criant besoin. Ces personnes doivent passer par plusieurs
étapes avant daccéder au marché du travail, soit maîtriser le français,
reprendre des cours quils ont quelquefois déjà complétés dans leur pays
dorigine parce que leurs diplômes ne sont pas reconnus à leur juste valeur, et
ensuite se mettre à langlais, avec pour résultat quils abandonnent en cours de
route faute dénergie ou en raison dobligations familiales.
Ces proscrits sont ainsi maintenus dans une situation économique précaire qui
contribue à les marginaliser une fois de plus, comme le mentionne, en page 7, le
document de consultation Vers une politique gouvernementale contre le racisme et
la discrimination :
(…) le cumul des discriminations hypothèque les chances dintégration des
personnes immigrantes ou issues des communautés culturelles. »
CHARTES DES DROITS
Impératif français voit lexclusion du marché du travail des travailleuses et
travailleurs québécois contraire à lesprit de la Déclaration universelle des
droits de lhomme des Nations Unies, et des chartes de la langue française et
celle des droits et libertés du Québec.
Dune part, la Déclaration universelle des droits de lhomme des Nations
Unies, aux articles 3, 23 et 25 va tout à fait en ce sens :
Article 3
- Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés
proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de
race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, dopinion, dorigine
nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
Article 23
- Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des
conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le
chômage. - Tous ont droit, sans aucune discrimination, à un salaire égal pour un
travail égal. - Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante
lui assurant ainsi quà sa famille une existence conforme à la dignité humaine
et complétée, sil y a lieu, par tous les moyens de protection sociale.
Article 25
- Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé,
son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation,
l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services
sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie,
d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses
moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté.
Dautre part, la Charte des droits et libertés du Québec spécifie très bien
que :
Article 10
Toute personne a droit à la reconnaissance et à l’exercice, en pleine égalité,
des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence
fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l’orientation sexuelle,
l’état civil, l’âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les
convictions politiques, la langue, l’origine ethnique ou nationale, la condition
sociale, le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap.
Article 16
Nul ne peut exercer de discrimination dans l’embauche, l’apprentissage, la durée
de la période de probation, la formation professionnelle, la promotion, la
mutation, le déplacement, la mise à pied, la suspension, le renvoi ou les
conditions de travail d’une personne ainsi que dans l’établissement de
catégories ou de classifications d’emploi
De plus, la Charte de la langue française donne à tous les travailleurs
vivant au Québec la possibilité de gagner sa vie en français :
Article 4
Les travailleurs ont le droit d’exercer leurs activités en français.
Article 46
Il est interdit à un employeur d’exiger pour l’accès à un emploi ou à un
poste la connaissance ou un niveau de connaissance spécifique d’une langue autre
que la langue officielle, à moins que l’accomplissement de la tâche ne nécessite
une telle connaissance.
RECONNAISSANCE DES DIPLôMES
Impératif français appuie le gouvernement du Québec dans son effort de
reconnaissance dune équivalence des formations et des diplômes acquis hors
Québec. Cette mesure aura pour effet de faciliter grandement lintégration des
personnes immigrantes considérant que le travail en est un facteur clé. Dans son
document de travail, Projets du ministère et de ses partenaires en matière
d’accès aux professions et métiers réglementés, le ministère de lImmigration et
des Communautés culturelles démontre sa volonté daméliorer les chances
dinsertion des immigrants par laccès à des professions et des métiers mieux
rémunérés et qui correspondent aux talents initiaux de ces nouveaux arrivants.
Cette reconnaissance permettrait aussi de raccourcir le temps dintégration
puisquune partie des apprentissages nécessaires à lexercice dune profession
ou dun métier a déjà été réalisée dans le pays dorigine de la personne.
(Extrait du site Internet du MICC)
Démarche d’amélioration des pratiques des ordres professionnels en matière de
reconnaissance d’une équivalence de diplôme et de formation acquis hors du
QuébecLe 10 février 2006, les dirigeants des ordres professionnels ont adopté à
l’unanimité des principes en matière de reconnaissance d’une équivalence de
diplôme et de formation acquis hors du Québec. Les ordres professionnels ont
ainsi convenu de s’assurer que leurs politiques et procédures en matière de
reconnaissance des acquis sont en conformité avec ces principes. Les ordres
professionnels procéderont donc, d’ici le 31 mars 2007, à l’évaluation de leurs
pratiques au regard des principes adoptés.
Afin de faire disparaître les pratiques de discrimination à lembauche, comme
il est démontré dans le présent mémoire, le gouvernement du Québec doit adopter
toutes les mesures qui simposent pour que lexigence de la connaissance de
langlais – ou de toute autre langue que le français – ou sa considération comme
un atout majeur soit interdite sur le territoire du Québec, sauf dans les rares
cas où les communications fréquentes avec des milieux anglophones à lextérieur
du Québec ou du Canada exigent une telle compétence.
RECOMMANDATIONS
Impératif français recommande :
- que le gouvernement prenne les moyens nécessaires pour que soit respecté le
droit fondamental des Québécoises et des Québécois de travailler en français tel
que le stipule larticle 4 de la Charte de la langue française : « Les
travailleurs ont le droit dexercer leurs activités en français »; - que le gouvernement oblige les employeurs dabandonner leurs exigences
discriminatoires en matière dembauche en adoptant les règlements nécessaires
qui assureront le respect de larticle 46 de la Charte de la langue française :
« Il est interdit à un employeur d’exiger pour l’accès à un emploi ou à un poste
la connaissance ou un niveau de connaissance spécifique d’une langue autre que
la langue officielle, à moins que l’accomplissement de la tâche ne nécessite une
telle connaissance. »; - que le gouvernement balise la mention « à moins que l’accomplissement de la
tâche ne nécessite une telle connaissance » pour éviter les nombreux abus
discriminatoires; - que la reconnaissance des diplômes obtenus à létranger se fasse plus
rapidement, soit plus juste et se rapproche davantage de la réalité dans un
contexte de mondialisation où la connaissance est de plus en plus accessible
partout et, par conséquent, les diplômes peuvent trouver leur équivalence plus
facilement dune institution à lautre, dun pays à lautre; - que le gouvernement du Québec exige des ordres professionnels une plus grande
ouverture pour permettre un plus grand accès aux immigrants; - qu’un mécanisme formel de concertation constitué de représentants du monde des
affaires, des syndicats et du gouvernement soit mis sur pied afin d’assurer le
respect de la nouvelle « Politique gouvernementale de lutte contre le racisme et
la discrimination » et du droit des travailleurs québécois « d’exercer leurs
activités en français »; - que laccès à la francisation pour les personnes immigrantes nouvellement
arrivées soit facilité par laugmentation de programmes et dinstitutions
offrant ce service. Les municipalités et les intervenants culturels des
principales régions d’accueil des immigrants pourraient jouer un rôle important
à cet égard.
Impératif français
Recherche et communications
C.P. 449, succ. Aylmer
Gatineau (Québec) J9H 5E7
Tél. : 819-684-8460
Téléc. : 819-684-5902
https://www.imperatif-francais.org
Imperatif@imperatif-francais.org
(Le 11 septembre 2006)