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“JESUS IS MY BOSS”

Dans un très récent courriel intitulé “La Grande Consult“, je faisais observer que lorsqu’il s’agit de s’adresser aux jeunes générations les services de l’Etat ne sont pas les derniers à emprunter au langage des publicitaires. C’est même à eux qu’ils demandent de bien vouloir être leurs interprètes pour essayer de se faire entendre des “jeunes“. En témoigne l’actuelle “consultation nationale“, dite La Grande Consult, lancée ce mois-ci par le SIG (Service d’information du gouvernement) auprès des 15-25 ans, en collaboration avec la radio privée Skyrock (première radio sur les moins de 25 ans et premier réseau social de blogs).

Au tour de l’Eglise de France, cette fois, exposée depuis de très nombreuses années à une profonde crise des vocations, d’essayer de se mettre à la portée des “jeunes“. Pour redresser la barre et pour “interpeller les jeunes à un moment où ils s’interrogent sur leur avenir“, la Conférence des évêques de France a en effet décidé de lancer une grande campagne de communication (sans doute a-t-on pris modèle sur certaines églises américaines). Un nouveau site, “résolument moderne“, http://www.etpourquoipasmoi.org/index.php, a été mis en ligne. Afin de toucher les 16/22 ans, des actions spécifiques sont menées à leur intention. Une page Facebook est disponible, ainsi que des vidéos sur YouTube et Dailymotion. N’est-ce pas Facebook, désormais, qui accomplit des miracles ? Cette petite merveille ne permet-elle pas, avec une facilité déconcertante, de rassembler, du jour au lendemain, des milliers de “jeunes” pour des “apéros” géants (même si les préfets s’efforcent dorénavant de mettre des bâtons dans les roues des organisateurs) ?

Pour son opération de communication (ou de publicité), l‘Eglise de France n’a rien trouvé de mieux que de recourir à l’anglais avec le slogan “Jesus is my boss” (Jésus est mon patron). Celui-ci existe du reste depuis longtemps déjà. On peut le voir sur de nombreux sites Internet anglophones, des articles d’habillement (notamment des casquettes pour “ados“) portant cette marque sont également vendus en ligne. Un visuel de cette campagne montre en effet un jeune homme portant sur sa veste un badge avec ce slogan. On y voit aussi la mention “why not ?” (pourquoi pas ?).

L’Eglise de France qui, pour faire “moderne“, a abandonné le latin (qui demeure la langue de l’Eglise catholique romaine) depuis longtemps, a certainement été convaincue par les publicitaires qu’elle a choisis comme conseils en communication que l’anglais est maintenant le langage des jeunes et que c’est dans cette langue qu’elle doit désormais s’adresser à eux pour essayer de les attirer à elle. L’anglais est pourtant une langue que le clergé ne connaît pas, qui est parfaitement étrangère à la très longue histoire de l’Eglise catholique (le Vatican – dont la langue véhiculaire est l’italien – est enregistré comme Etat francophone auprès des organisations internationales car sa langue diplomatique est le français).

Plus de 2000 ans après la naissance du Christ, ce recours sur le tard de l’Eglise de France à une langue, celle du commerce, que l’on apparente couramment aux Marchands du Temple, est pour le moins insolite, sinon pitoyable. La voilà réduite aujourd’hui, comme n’importe quel commerce, à s’en remettre à des agences de “pub” pour essayer de redorer son blason ! Cela seulement suffit à mesurer l’ampleur de son désarroi et de la terrible crise qu’elle traverse, comme toutes les institutions qui, venant de loin dans le temps, s’efforcent de transmettre un héritage.

Jean-Pierre Busnel
Président de l’IAB
jpabusnel@wanadoo.fr

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