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TRENTIÈME ANNIVERSAIRE DE LA CHARTE DE LA LANGUE FRANÇAISE

Il y aura trente ans ce 26 août que le Québec ouvrait un nouveau chapitre de son histoire en adoptant la loi 101. Ce fut un coup d’audace formidable dont les effets se firent sentir immédiatement. La langue française se voyait enfin reconnaître la place qui lui revient. La force de la loi révélait le peuple à lui-même. Cette charge symbolique eut un impact considérable sur notre société : celui de donner enfin à la majorité sa légitimité nationale.

L’affirmation du français comme langue officielle, langue commune, langue du travail, langue des échanges et du rayonnement, trait caractéristique et fondateur de la nation et porteur de son avenir, voilà le geste et la volonté que nous célébrons aujourd’hui.En normalisant la place du français dans ses institutions, la société québécoise s’en retrouvait radicalement transformée, et la nation mise en mouvement : telle aura été la grande intuition de Camille Laurin. C’est par rapport à cette expérience fondatrice plus qu’aux diverses mesures concrètes prévues qu’il faut d’abord mesurer le chemin parcouru. Car si des progrès ont été réalisés, il faut bien constater qu’ils ne l’auront jamais été dans la quiétude sereine d’une quelconque pax canadiana. Dès son origine, des forces ont été mises à l’ouvre pour la dénaturer et la faire dévier de sa trajectoire. Aussitôt déposée devant l’Assemblée nationale, la loi qui devait faire du français la seule langue officielle du Québec a été mise à l’épreuve par ceux qui ne cesseront jamais de la contester.

La francisation du Québec, objectif de la Charte de la langue française, n’est pas complétée, loin s’en faut; surtout à Montréal, où des progrès ont certes été réalisés, mais où dans plusieurs domaines le français plafonne quand il ne régresse pas. Les organismes responsables d’appliquer la Charte ont des moyens diminués. La politique linguistique des services gouvernementaux est largement bafouée. En 2002, la loi 104, par son article 16, rétablissait l’usage exclusif de la langue officielle dans les communications écrites de l’Administration avec les autres gouvernements et avec les personnes morales établies au Québec. Cet article de la loi n’a toujours pas été mis en vigueur.

La majorité des allophones de Montréal et des anglophones de tout le Québec travaillent principalement en anglais. Dans les foyers, la majorité des transferts linguistiques se font toujours vers cette langue, contribuant de la sorte à accélérer notre minorisation en réduisant notre poids démographique. Plus de la moitié des jeunes allophones choisissent de fréquenter le cégep anglais. Le bilinguisme recolonise les institutions publiques.

Montréal, notre métropole, laisse voir chaque jour davantage les signes d’une aliénation qu’on croyait vaincue, dans la langue des services, dans le fonctionnement et l’organisation des institutions. Le paysage commercial se défrancise à mesure que la mondialisation sert de prétexte à l’anglicisation des raisons sociales. La langue publique commune est celle qui permet aux gens de différentes langues maternelles de communiquer entre eux. C’est donc dans les régions linguistiquement mixtes et surtout dans la région Montréalaise qu’on peut constater si le français est la langue commune au Québec.

Les dispositions linguistiques de la loi 101 ont été érodées au point où il faudrait désormais réanimer cette loi fondatrice, la raccorder à ses intentions premières. Car ce qu’il reste de cette loi motive un sentiment trompeur de sécurité. La fierté que nous tirons de ce qu’elle a déjà été ne doit pas empêcher de constater ce qu’elle n’est plus.

Il faut une nouvelle loi 101, dont les dispositions permettront de mieux accorder la francisation avec les diverses fonctions d’intégration des institutions publiques.

Il faut une loi 101 restaurée pour que le Québec se dote d’un ordre institutionnel cohérent. C’est particulièrement névralgique dans le système de santé montréalais et dans les établissements d’enseignement supérieur présentement fondés sur une logique de développement séparé. Si le français est la langue officielle du Québec, il doit être la langue de toutes les institutions nationales, et toutes doivent être pensées pour soutenir et confirmer le statut de la langue française comme langue normale du fonctionnement des institutions et de l’intégration sociale. Cela n’exclut rien quant au respect de la minorité anglophone, mais il faut être clair : l’équilibre linguistique à Montréal ne se construira pas en partageant les ressources à parts égales entre institutions anglophones et francophones.

Le Québec se trouve de plus en plus radicalement confronté à des choix exigeants. L’ordre du monde bouge vite et nous sommes condamnés à agir avec une cohérence et une cohésion exemplaires sans quoi nous risquons d’être emportés par des forces qui nous réduiront à l’insignifiance. La loi 101, nous en sommes assez fiers pour la célébrer. Et assez conscients de ce qu’elle nous a révélé de nous-mêmes pour appeler à sa restauration. Les plus beaux fruits de la Charte de la langue française sont encore à venir.

(Extrait du site de la CSQ à http://www.csq.qc.net)

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