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FRANC-PARLER

Article de Richard MARTINEAU
extrait du Journal de Montréal
mercredi 11 juillet 2007

Le 2 juillet dernier, j’ai publié une chronique sur ma récente visite à Ottawa. Je disais que j’ai éprouvé beaucoup de difficulté à me faire servir en français dans les commerces de la ville, même si c’est la capitale nationale du pays.

Ce texte m’a valu un nombre important de courriels. Plusieurs personnes m’ont écrit pour me dire que la situation à Montréal n’est guère plus reluisante.
Vous savez quoi ? Vous n’avez pas entièrement tort.

Speak white

Avant-hier, ma blonde et moi sommes allés souper dans un restaurant italien, dans le Vieux-Montréal (un quartier qui s’anglicise à la vitesse de la lumière).

L’hôtesse qui accueillait les clients ne parlait pas un maudit mot de français. Pas un. « Nous avons réservé pour 21h30 au nom de Richard Martineau », lui ai-je dit. « What ? »
Elle me regardait comme si je lui avais récité « Le Vaisseau d’Or » en klingon.
Après avoir essayé -sans succès- de me faire comprendre dans ma langue, je lui ai demandé (dans son speak white natal) pourquoi elle ne parlait pas un traître mot de français.
« I’m from Toronto, m’a-t-elle répondu, visiblement agacée. Anyway, you speak english, no ? »
Ma blonde (qui est plus intraitable que moi sur cette question) a failli passer à travers le plafond.
« Oui, je parle anglais, lui a-t-elle lancé. Je parle aussi italien, espagnol et je me débrouille en japonais. Ça ne change rien au fait que je veux être servie dans MA langue quand je suis au Québec. »

Two five six O one one

On voulait partir, mais bon, on était crevés, on avait faim et il était tard.
Quand le serveur s’est pointé à notre table, on lui a demandé pourquoi l’hôtesse ne parlait pas français. « Elle vient de Toronto et elle veut apprendre notre langue », nous a-t-il répondu.
« C’est très sympathique, lui a-t-on dit. Mais c’est un restaurant, ici, pas l’Institut linguistique provincial. Pouvez- vous aller chercher le gérant ? On veut déposer une plainte. »
« Pas de problème, nous a répondu le serveur. Il va venir vous voir. »

Le bonhomme ne s’est jamais pointé à notre table. Quand on a de nouveau demandé à le rencontrer, à la fin du repas, on nous a dit qu’il avait quitté le resto.

Le fait que les gens ne peuvent être accueillis en français dans son resto semble lui passer dix mille pieds au-dessus de la tête.

On est-tu accommodant !
Essayez ça, vous, de trouver un job dans un resto de Toronto sans parler un mot d’anglais ! Tout ce que vous pourrez faire, c’est laver la vaisselle. Mais ici, au Québec, on est bonne pâte.

Les unilingues anglos, on les met à l’accueil !!!! Pour qu’ils puissent APPRENDRE NOTRE LANGUE !!!!

Maudit qu’on est bonasse, au Québec. Comme je le dis souvent, non seulement on baisse nos culottes devant le premier venu, mais on fournit le lubrifiant.

N’importe quoi pour être aimé, pour prouver qu’on est fin, qu’on est du bon monde…

On a tellement peur de déranger qu’on s’excuse quand quelqu’un nous donne une jambette.

Le 24 juin, on sort les drapeaux et la bière. Et le lendemain, on se remet à faire la carpette. Vous ne trouvez pas ça décourageant, vous ?

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