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INEFFICACITÉ DE L’ONU

Extrait du Le Figaro du 30 septembre 2005

LE FIGARO
vendredi 30 septembre 2005


La globalité de notre monde a atteint
son paroxysme dans la sphère financière,
où la liberté des échanges est presque totale

Une si brave
mondialisation…

PAR JACQUES MYARD
Député UMP des Yvelines
président du Cercle Nation et République.

Chacun sait que le temps de la marine à voile est révolu : la révolution des
communications a transformé le vaste monde en un village planétaire qui met à
l’unisson les images télévisées dans une immédiateté toujours renouvelée.

La proximité géographique qui commandait jadis la politique étrangère – « Je
fais la politique étrangère de notre géographie » proclamait Talleyrand-, est
devenue un critère très relatif, voire secondaire de l’action internationale
puisque la France peut dialoguer en temps réel avec le monde entier. Aucun point
du globe n’est aujourd’hui à plus de 24 heures de vol. Il n’est pas certain que
le monde politique ait réellement compris ce bouleversement de la notion de
proximité géographique qui s’applique désormais à tout point de la planète.

Les tenants d’une construction européenne exclusive et intégrée n’ont pas
réalisé que la politique internationale fondée sur un critère géographique était
désormais dépassée. La mondialisation bouleverse le jeu des interactions, des
interdépendances, elle remet radicalement en cause la construction européenne
actuelle qu’elle transcende.

Les bienfaits de la révolution des communications qui a engendré la
mondialisation sont réels : chacun peut voyager à l’autre bout du mode à un prix
abordable, les entreprises découvrent de nouveaux marchés et débouchés, les
intérêts se croisent et se développent au gré des affinités et des opportunités.

La globalité de notre monde a atteint son paroxysme dans la sphère financière
où la liberté des échanges est presque totale et s’étend désormais pratiquement
à toute la planète, Chine comprise. Les multinationales et notamment les grandes
compagnies d’assurance ont la planète entière pour champ d’action. Le monde
devient pour elles une seule et même unité d’action, un espace ouvert, sans
écluse.

La mondialisation a décuplé les effets de l’explosion démographique que
connaît l’Humanité ces dernières décennies. Les migrations s’effectuent
désormais à l’échelle de la planète, parfois dans des conditions tragiques à
l’image de ces immigrés entassés dans des bateaux surchargés, ballottés par les
flots.

Toutefois, si le monde est devenu un champ clos, son unité n’est
qu’apparente. En rapprochant les continents et les hommes, la mondialisation a
aussi rapproché les conflits et les ruptures en tout genre qui nourrissent les
affrontements et les haines.

Le terrorisme international est le parangon de la mondialisation, il en
épouse toutes les techniques, tous les avantages, dévoyant à son profit les
libertés du monde moderne.

En matière économique, la mondialisation a, certes, développé les échanges –
le commerce international croît de 7 à 8% par an – mais elle a aussi fragilisé
les économies nationales, notamment en raison des inégalités de développement;
les délocalisations désindustrialisent les pays développés, mais au Nord comme
au Sud on voit apparaître des économies duales génératrices de conflits sociaux.

L’interconnexion grandissante des systèmes monétaires, financiers et des
assurances fragilise le système financier mondial. Sait-on que tous les 22 jours
l’équivalent de la masse monétaire mondiale change de main ? Sait-on que les
compagnies françaises d’assurances ont payé des centaines de millions d’euros,
au titre de la réassurance, aux compagnies américaines, à la suite de l’attaque
sur les tours de New York le 11 septembre 2001, sans oublier les conséquences à
venir de la catastrophe survenue en Louisiane?

Cette interdépendance croissante des acteurs privés et transnationaux, si
elle crée des solidarités, peut aussi provoquer des réactions en chaîne qui
risquent d’entraîner l’écroulement du système tel un château de cartes.

La mondialisation laissée à elle-même, au lieu de conforter la stabilité
politique, mine tout le système mondial. Les relations transnationales ont pris
le haut du pavé sur la scène internationale, reléguant l’action des Etats dans
un rôle secondaire. Elles créent un mouvement brownien incessant créateur de
richesses et d’échanges, la planète devenant le gigantesque « mélangeur » d’un
cocktail détonant.

Il faut se rendre à l’évidence : l’idéologie ambiante du « laisser-fairisme »
est destructrice des identités et fortement déstabilisatrice. Il est urgent de
canaliser ces forces, de recréer des écluses et des solidarités pour éviter la
dévastation d’un tsunami mondial.

Au moment où l’ONU célèbre ses 60 ans et où il est de bon ton de se lamenter
sur son inefficacité, il serait juste de prendre conscience que l’organisation
mondiale n’est en réalité que le reflet de notre propre impuissance et surtout
de nos abandons collectifs. Le « laisser- fairisme » mondial prôné notamment par
l’OMC n’est pas la réponse à la situation du monde.

Seul le retour d’une conscience collective politique, seul le retour des
Etats pour édicter des règles de conduite pourront recréer un ordre mondial
fondé sur un véritable co-développement maîtrisé et financé. A cet égard,
l’initiative de la France visant à lever une taxe modique sur le transport
aérien, présentée par le Premier Ministre Dominique de Villepin au Conseil de
sécurité à New-York, montre la voie.

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