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PETITE HISTOIRE DE LA SAINT

PETITE HISTOIRE DE LA SAINT-JEAN-BAPTISTE

La fête de la Saint-Jean-Baptiste a une riche et longue histoire. Depuis des
temps immémoriaux, elle a d’abord été une fête du solstice d’été que
les peuples païens célébraient par de grands feux de joie, à ce moment de l’année
où la nuit est la plus courte. Ces feux symbolisaient la lumière du soleil à
son apogée.

Puis la fête païenne fut christianisée. Au cours du IVe siècle, apparut
la fête de la Nativité de saint Jean Baptiste. Cette fête précède de six
mois celle de Noël, apparue elle aussi au IVe siècle, en référence à la
parole de l’ange Gabriel à Marie, au jour de l’Annonciation, le 25 mars:
«Voici qu’élisabeth, ta parente, en est à son sixième mois» (Luc 1, 36).
Trois mois plus tard, l’église célèbre donc la naissance de Jean Baptiste,
le Précurseur du Messie.

La fête de la Nativité de saint Jean Baptiste et celle de la Nativité de
Jésus sont intimement liées et sont toutes deux en relation avec le cycle du
soleil. L’une a lieu au solstice d’été, l’autre au solstice d’hiver.
Ceci illustre la parole de Jean Baptiste: «Lui, il faut qu’il grandisse; et
moi, que je diminue» (Jean 3, 30). En effet, à partir du solstice d’été,
la durée des jours diminue, alors qu’elle augmente à partir du solstice d’hiver.
Jean est le Précurseur du Christ, «la lumière du monde».

En France, la tradition des feux de joie, venue de la plus haute antiquité,
fut conservée pour célébrer la naissance de saint Jean Baptiste. On raconte
que le roi lui-même allumait les feux de la Saint-Jean. Les premiers colons
venus de France pour coloniser la Nouvelle-France apportèrent avec eux cette
fête qui leur tenait beaucoup à coeur. C’est précisément en la fête de la
Nativité de saint Jean Baptiste, le 24 juin 1615, à la rivière des Prairies,
que fut célébrée la première messe en Canada (auparavant la messe avait
été célébrée en Acadie) par le Père Récollet Denis Jamet, assisté du
Père Joseph Le Caron, en présence de Champlain.

Une fois installés à Québec et aux Trois-Rivières, les premiers habitants
font revivre, sur les bords du Saint-Laurent, les coutumes ancestrales qui leur
sont chères, surtout les feux de joie de la Saint-Jean-Baptiste. Dès 1636, les
Relations des Jésuites signalent la cérémonie des feux de la
Saint-Jean. L’historien Benjamin Sulte (1841-1923) rapporte avoir vu, en 1850,
des feux qui se regardaient les uns les autres sur les rives nord et sud du
fleuve, la veille de la Saint-Jean.

En 1834, Ludger Duvernay fonde la Société Saint-Jean-Baptiste à Montréal.
Puis, la même année, le 24 juin est choisi comme date de la fête nationale
des Canadiens français. En 1842, la Société Saint-Jean-Baptiste est
également fondée à Québec. Les organisateurs de la fête décident alors de
toujours commencer la célébration du 24 juin par une messe solennelle avec
sermon de circonstance. Dès le début donc, la fête de la Saint-Jean-Baptiste
a eu un caractère à la fois national et religieux.

Le patronage si populaire de saint Jean Baptiste au Canada français se
devait d’être officiellement sanctionné par l’église. C’est le Pape
saint Pie X qui, le 25 février 1908, déclara saint Jean Baptiste patron
spécial des Canadiens français. Voici un extrait de sa déclaration: «Lorsque
Notre vénérable Frère l’Archevêque de Québec, ville du Canada, Nous a
présenté, au nom de la Société Saint-Jean-Baptiste fondée dans cette même
ville, des lettres où on Nous demandait de déclarer, en vertu de Notre
autorité, le saint Précurseur patron des Franco-Canadiens, jugeant que cela
pouvait être grandement profitable aux intérêts de la vie catholique en ce
pays, nous avons décidé de faire droit à ces prières. Et nous le faisons d’autant
plus volontiers que Nous avons une grande confiance dans le secours et l’intercession
de ce saint que, depuis son origine, le peuple canadien n’a cessé d’honorer
d’une piété toute particulière. C’est pourquoi – Nous voudrions que
cela soit pour le plus grand bien, pour le bonheur et la prospérité de l’église
canadienne et de tous les catholiques de ce pays – , par Notre autorité
suprême et par les présentes, après en avoir conféré avec nos vénérables
Frères les Cardinaux de la sainte église romaine, préposés aux affaires de
la Propagande, Nous établissons, Nous constituons et Nous proclamons saint Jean
Baptiste patron spécial auprès de Dieu des fidèles franco-canadiens, tant de
ceux qui sont au Canada que de ceux qui vivent sur une terre étrangère.»

Enfin, mentionnons la dernière étape dans l’évolution de la
Saint-Jean-Baptiste. Le 11 mai 1977, le gouvernement du Québec décrétait que
le 24 juin, jour de la Saint-Jean-Baptiste, serait désormais «Fête nationale
du Québec». Le 24 juin devenait ainsi la fête nationale de tous les
Québécois et Québécoises, c’est-à-dire de toutes les personnes qui
résident sur l’ensemble du territoire du Québec, quelle que soit leur
origine, leur langue, leur religion ou leur option politique. Nous sommes ici
sur le plan civil. Ce qui n’enlève rien au fait que saint Jean Baptiste
demeure, sur le plan religieux, le patron spécial des Canadiens français.

* * *

Durant plusieurs années, sur les chars allégoriques qui défilaient dans
les rues de nombreuses villes le 24 juin, saint Jean Baptiste a été
représenté par un enfant blond frisé accompagné d’un mouton. C’était
une façon plutôt mièvre de représenter le Précurseur de Jésus Christ et
plusieurs ignoraient la raison d’être du mouton.

En fait, Jean Baptiste était le fils de Zacharie et d’élisabeth (cf. Luc
1, 5-17). à sa naissance, on lui donna le nom de Jean (cf. Luc 1, 57-66). Par
la suite il reçut le nom de Baptiste parce qu’il baptisait dans l’eau du
Jourdain. Dans le désert, il menait une vie rude et austère, exhortant ses
concitoyens à changer de vie pour préparer la venue du Seigneur (cf. Matthieu
3, 1-3). Il a eu pour mission de présenter Jésus au monde. Il l’a désigné
comme l’Agneau de Dieu (cf. Jean 1, 29). Voilà pourquoi on représentait Jean
Baptiste avec un mouton sur les chars allégoriques d’autrefois.

Dans le tourbillon des fêtes de la Saint-Jean-Baptiste, il importe de ne pas
perdre de vue la figure même de Jean Baptiste, le saint, le prophète, le
Précurseur de Jésus Christ. Aujourd’hui encore, Jean Baptiste est un modèle
à suivre. Il nous interpelle. Il continue de nous annoncer la Bonne Nouvelle
(cf. Luc 3, 18) en nous indiquant Jésus Christ comme le Sauveur du monde. Et il
nous invite à bâtir un monde juste (cf. Luc 3, 10-14), fraternel, fondé sur l’amour.
Quand nous allumerons nos feux de la Saint-Jean, rappelons-nous que ces feux de
joie sont le symbole de Jésus Christ «lumière du monde» (Jean 8, 12), dont
Jean Baptiste a été le Précurseur.

Pierre Dufresne

(Pour en savoir plus: SAINTONGE, Frédéric, s.j., Témoin de la lumière:
Jean le Baptiste, sa vie, son culte
, éd. Lumen, Montréal, 1945, 372 p.)

Parlant du Christ,
Jean Baptiste disait:
«Lui, il faut qu’il grandisse;
et moi, que je diminue.»
(Jean 3, 30)

(Ce texte a été publié dans Prions en église, édition mensuelle de juin
2001 et édition dominicale du 24 juin 2001.)


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