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ÉDUCATION UNIVERSITAIRE DES ÉTUDIANTS NON QUÉBÉCOIS

éDUCATION UNIVERSITAIRE DES éTUDIANTS NON QUéBéCOIS

Guy Boutin
Mouvement estrien pour le français

LE CONTEXTE

Il y a lieu d’examiner si l’argent dépensé répond aux besoins de la population du
Québec, car les choix sont difficiles. Les coûts de formation d’un bachelier sont
élevés pour la collectivité. Au Québec, la durée moyenne de formation est de 17,1
années pour l’obtention d’un baccalauréat, soit un coût total de 150 032,00$. à
l’heure de choix budgétaires douloureux, il y a lieu de se poser collectivement des
questions par rapport à certaines habitudes.

L’éVOLUTION DE LA DéPENSE PAR éTUDIANT ET DE L’INDICE DES PRIX à LA CONSOMMATION
(IPC)

L’évolution de la dépense par élève ou par étudiant des organismes d’enseignement
et de l’IPC (1986-1987 = 100)

1986-87 1990-91 1994-95 1994-95 (en $)
«Commissions» scolaires 100,0 125,4 136,6 5 823
Cégeps 100,0 128,2 128,3 6 926
Universités 100,0 129,7 144,9 12 123
Indice des prix à la consommation 100,0 117,9 128,4

En 1994-1995, la dépense par élève des «commissions» scolaires était de 5 823$,
celle des cégeps de 6 926$ et la dépense par étudiant des universités était de 12
123$. Il s’agit ici de la dépense de fonctionnement des organismes d’enseignement. La
dépense de fonctionnement des universités ne comprend pas la recherche subventionnée.

Entre 1986 et 1994, la dépense par élève des «commissions» scolaires a augmenté
de 37 p.100, celle des cégeps de 28 p.100 et la dépense par étudiant des universités
s’est accrue de 45 p.100. En comparaison, l’indice des prix à la consommation (IPC) a
augmenté de 28 p.100 au cours de cette période. L’augmentation plus forte de la dépense
par élève des «commissions» scolaires que celle de l’IPC peut s’expliquer par les
changements dans la composition de l’effectif scolaire (ex.: plus grande proportion des
effectifs scolaires déclarés handicapés ou en difficulté d’adaptation et
d’apprentissage), par une augmentation des ressources consacrées à la lutte au
décrochage scolaire (ex.: sommes additionnelles destinées aux activités de consultation
et d’animation), par les besoins financiers grandissants de certains services (ex.:
transport scolaire),etc.

Mais, c’est la dépense par étudiant des universités qui a connu la plus forte
augmentation. Cette progression plus rapide de la dépense par étudiant a été causée
par le rythme de croissance des subventions gouvernementales par étudiant, mais aussi par
l’augmentation des revenus provenant des droits de scolarité. à la suite du dégel des
droits de scolarité en 1990-1991, la part de ces derniers quant au financement des
universités est passée de 94 millions de dollars en 1989-1990 à environ 310 millions en
1994-1995.

UN PORTRAIT DE LA SITUATION

La publication intitulée Indicateurs de l’activité universitaire, édition 1994,
publiée par la Direction générale des affaires universitaires et scientifiques, nous
fournit des statistiques sur les effectifs étudiants des universités québécoises. Nous
y apprenons qu’en 93-94 l’effectif étudiant total était de 253 488 soit 136 545
étudiants à temps complet et 116 841 à temps partiel. L’effectif étudiant provenant de
l’extérieur du Québec était de 35 242 dont 19 456 inscrits dans les universités
anglophones. Dans ces trois universités, nous pouvons comparer l’effectif étudiant à
temps complet avec l’effectif étudiant provenant de l’extérieur du Québec.

Rappelons que la population québécoise est répartie de la façon suivante, selon la
langue:

francophone: 85%, anglophone: 7% et allophone: 8%.

L’effectif étudiant anglophone universitaire à temps complet représente 36 942
personnes sur 136 545 pour un pourcentage de 27%, soit PRATIQUEMENT 4 FOIS SA PROPORTION
au sein de la population québécoise. Du côté des universitaires anglophones, on
invoque la«mondialisation de l’économie», la création de réseaux d’influence pour le
futur, les échanges culturels, l’argent dépensé par les étudiants hors Québec pendant
leurs études, le fait que la présence de ces étudiants permet de rendre viables
certains programmes ou facultés. Selon les statistiques du ministère de
l’éducation du Québec, il y a 19 456 étudiants de l’extérieur du Québec dans les
trois universités anglophones par rapport à un total de 36 942 étudiants inscrits à
temps complet. Le Québec est la province qui reçoit le plus d’étudiants étrangers.

PROPORTION DE L’EFFECTIF éTUDIANT PROVENANT DE L’EXTéRIEUR DU QUéBEC PAR RAPPORT à
L’EFFECTIF éTUDIANT à TEMPS COMPLET

UNIVERSITéS

Nombre d’étudiants provenant de l’extérieur du Québec par rapport au nombre
d’étudiants à temps complet

Pourcentage de la population étudiante provenant de l’extérieur du Québec

Université Bishop 1296 par rapport à 1902 68 %
Université Concordia 5810 par rapport à 13823 42 %
Université McGill 12350 par rapport à 21217 58 %
Total 19456 par rapport à 36942 52 %

L’effectif étudiant provenant de l’extérieur est comparé à l’effectif étudiant à
temps complet parce qu’il serait surprenant qu’on vienne de l’extérieur du Québec pour y
étudier à temps partiel. La limite du raisonnable a été dépassée et le fardeau
économique que cela impose à la population québécoise fait que la situation devrait
être corrigée. Ces étudiants sont certes attirés par la bonne réputation des
universités anglophones, mais surtout par les conditions économiques favorables comme le
coût de la vie plus faible et des droits de scolarité plus bas. En effet des données de
l’Association canadienne du personnel universitaire permettent de dresser le tableau
suivant:

Moyenne des droits de scolarité des étudiants inscrits au 1er cycle de l’enseignement
universitaire, à temps plein, au Canada (en $).

Provinces 1989-1990 1993-1994 1995-1996*
Québec 581$ 1 630$ 1 682$
Ontario 1 561$ 2 076$ 2 491$
Canada:(sans le Québec) 1 541$ 2 202$ 2 538$
Atlantique 1 689$ 2 446$ 2 795$
Ouest 1 440$ 2 298$ 2 626$

*Estimations basées sur les moyennes 1994-1995,
ajustées au moyen des taux d’augmentation des droits en 1995-1996,
tels qu’elles ont été publiées dans le journal La Presse du 8 novembre 1995.

QUELQUES FAITS TROUBLANTS

UN CERTAIN LAXISME ADMINISTRATIF AU NIVEAU DU CONTRôLE DE LA CITOYENNETé DES
éTUDIANTS HORS QUéBEC

En 1995, le vérificateur général du Québec a fait une étude sectorielle auprès de
cinq universités quant à l’utilisation des subventions versées à ces dernières.

à elle seule, McGill reçoit la moitié des 4 800 étudiants étrangers non exemptés
(et déclarés) qui reçoivent l’enseignement universitaire au Québec. Elle est la seule
à ne pas exiger la preuve de citoyenneté de l’étudiant qui se déclare citoyen canadien
ou résident permanent. Elle se fie uniquement à la déclaration signée par l’étudiant.
Ainsi,«dans cette université, plus d’un étudiant sur trois, admis sur la base d’études
secondaires terminées aux états-Unis, s’est déclaré citoyen canadien ou résident
permanent, s’exemptant sans autre formalité de plusieurs milliers de dollars de frais
supplémentaires.»

DES BOURSES POUR LES éTUDIANTS éTRANGERS

Les étudiants non-citoyens canadiens sont automatiquement boursiers du Gouvernement du
Québec. Pour tous les étudiants provenant des pays avec lesquels le Québec n’a pas
d’entente de réciprocité, le coût des frais de scolarité devrait être le coût réel.
L’étudiant étranger devrait défrayer le coût entier du programme de formation où il
s’inscrit. Pendant ce temps, nous payons une bourse de 4,000 dollars à chaque étudiant
hors Canada soit la différence entre le coût moyen d’une année d’études universitaire
(12,123 dollars) et la somme exigée (8,000 dollars). Pour un étudiant étatsunien, la
situation représente UNE VRAIE AUBAINE, à laquelle vient s’ajouter la dévaluation
du dollar canadien. Cette aberration devrait être corrigée et l’on pourrait s’inspirer
de ce qui se fait aux états-Unis, où l’on tient compte du domicile de l’étudiant
lorsqu’il s’agit d’établir le coût des frais de scolarité.

DES RéFUGIéS éCONOMIQUES

Il s’agit dans plusieurs cas d’étudiants réfugiés économiques. Bien que des
ententes de réciprocité existent au niveau des provinces canadiennes, le coût pour la
société québécoise est assez élevé, soit 119,4 millions de dollars. Ce coût est
obtenu en prenant la dépense moyenne par étudiant des universités au Québec, soit 12
123$ moins la moyenne (1 630$ ) des frais de scolarité des étudiants inscrits au 1er
cycle universitaire à temps plein au Québec, le total étant multiplié par le nombre
d’étudiants provenant des autres provinces canadiennes. La Direction générale des
affaires universitaires et scientifiques estime à 11 383, dont 6 827 de l’Ontario, le
nombre d’étudiants provenant des provinces canadiennes. La même source nous indique que
pour les Québécois étudiant dans les autres provinces canadiennes il y en a 2 000 qui
reçoivent de l’aide financière. Comme 50% des étudiants universitaires québécois
reçoivent de l’aide financière, on estime à environ 4 000 le nombre d’étudiants
québécois anglophones et francophones qui étudient dans les universités des autres
provinces. CELA ENTRAÎNE UN BILAN NéGATIF POUR LE QUéBEC.

L’EMBONPOINT DE CERTAINS CRéE LA FAMINE CHEZ LES AUTRES

La clientèle étudiante universitaire anglophone reçoit de la part du gouvernement
fédéral une aide importante qui est concentrée dans les universités Bishop, Concordia
et McGill. Les francophones hors Québec ont déploré cette situation. La Commission
«nationale» des parents francophones hors Québec a démontré que sur 2,37 milliards $
accordés de 1970 à 1987 par l’intermédiaire du programme fédéral pour l’enseignement
des langues officielles, les anglophones de la province ont obtenu 47,7 pour cent alors
que les francophones hors Québec ont reçu 28,5 pour cent des sommes attribuées. Dans un
autre programme, les universités anglophones du Québec ont 72,3 millions des 481
millions pour les établissements post-secondaires des «minorités» linguistiques. La
ministre canadienne du Patrimoine, madame Sheila Copps s’est engagée à corriger la
situation…

CONCLUSION

LA RATIONALISATION DE L’ENSEIGNEMENT UNIVERSITAIRE ET COLLéGIAL

Un effort devrait être fait du côté de l’enseignement universitaire. Le coût moyen
d’un baccalauréat étant de 42,420.00$ pour une durée moyenne de 3.5 années, il
faudrait s’assurer que ces diplômés (sauf exception) intègrent bien le marché
QUéBéCOIS du travail.

RéPONDRE AUX BESOINS DE LA POPULATION DU QUéBEC

Le réseau universitaire anglophone répondit-il aux besoins éducatifs de la
population québécoise ou est-il orienté pour recruter des étudiants hors Québec?
Quand, pour certaines universités il faut répondre aux besoins éducatifs d’étudiants
hors Québec pour JUSTIFIER SON EXISTENCE, il y a lieu de se poser des questions. Parmi
les étudiants universitaires hors Québec, plusieurs ont à leur arrivée une formation
équivalente à 12 ans d’études, ce qui oblige les universités anglo-québécoises
à leur offrir un programme de mise à niveau pour compenser l’année de scolarité
manquante par rapport au système collégial québécois. Selon la direction générale
des affaires universitaires et scientifiques, cette année de mise à niveau est
ENTIèREMENT FINANCéE PAR LES CONTRIBUABLES QUéBéCOIS. Cette année de rattrapage
coûte des dizaines de millions de dollars, car elle ajoute en moyenne une année de plus
à la formation des étudiants venus de l’extérieur du Québec.

LE QUéBEC, à L’HEURE DES CHOIX

Pour certains membres de «l’intelligentsia» québécoise, il n’est pas correct,
politiquement parlant, de discuter de ces sujets chauds sur la place publique. à l’heure
où les systèmes de santé et d’éducation francophones souffrent d’inanition, alors que
les Québécois supportent un fardeau fiscal parmi les plus élevés au monde, nous ne
sommes plus en mesure d’apporter la plus «généreuse» contribution de l’univers à
l’éducation universitaire des étudiants non québécois.

Guy Boutin

L’auteur a été professeur au primaire, au secondaire et au collégial. Il a fait
partie de comité d’école, comité de parents, conseil scolaire. Il occupe la fonction de
directeur de l’enseignement et des programmes au Collège de Sherbrooke. Cet article est
écrit à titre personnel.


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