Rechercher
Close this search box.

MORT OU SURVIE DE MONTFORT

MORT OU SURVIE DE
MONTFORT

Hubert Laroque
Hull, Québec

Dans quelques jours, on
saura ce qu’il adviendra de l’hôpital Montfort. Le moins que
l’on puisse dire, c’est que l’avenir s’annonce menaçant. Le
gouvernement Harris s’est hypocritement retranché derrière
un Comité en prétendant que la décision était de pure
technicité. Les politiciens fédéraux, si prompts à voler
au secours des Anglos de Montréal, se sont commis du bout
des lèvres, avec des réticences, des euphémismes qui
disent bien de quel côté se trouve leur allégeance. Les
députés et les ministres «franco-ontariens» ont suivi le
même chemin de lâcheté et de démission en prétextant la
solidarité ministérielle. Quand on est serviteur de la
majorité anglophone, la conscience et la solidarité
nationales sont sacrifiées les premières. Telle est la loi
du fédéralisme canadien. L’unité nationale, comme
l’entendent les messieurs du fédéralisme, signifie un
divorce total entre un discours de tolérance et d’égalité,
et des actes qui tranchent toujours en faveur de l’Anglais.

La question de Montfort
n’est pas une question purement locale, elle est le reflet
fidèle de la relation entre les Canadiens français, les
Québécois et les Anglo-canadiens. Nos politiciens ont
habitué le pouvoir fédéraliste anglophone à tant de
complicité, de vile acceptation de tout ce qui nous diminue
que le Canada anglais tient pour acquis qu’il peut tout
tenter contre nous impunément. Il est sans doute bien tard,
et le pli de la soumission, de la servitude politiques nous
marquent bien profondément, de façon quasi indélébile. Et
pourtant, il suffirait d’un seul ministre fédéral
québécois ou canadien français qui dise un «non» sans
faille, d’un seul homme qui serait indifférent aux faveurs
et aux honneurs du régime pour que les Canadiens français
redeviennent un peuple, au lieu d’une minorité de plus en
plus réduite et consentante à sa banalisation. Nos
élections cesseraient alors d’être la triste et
sempiternelle répétition du désarroi et de la confusion
par laquelle on élit à pleines urnes des complices de notre
humiliation et de notre effacement politiques.

Il faudrait, de façon
urgente, que les Franco-ontariens et les Québécois
retrouvent le sens de la solidarité nationale. Les droits du
Québec, et ceux de l’Ontario français sont, en effet, une
seule et même chose. Tout recul, tout échec a son
contrecoup, de part et d’autre d’une frontière que
l’histoire anglaise nous a imposée, et qui, malheureusement,
l’assimilation faisant son chemin, s’est intériorisée sous
forme de suspicion et d’animosité.

Cette absence
d’intelligence et d’intégrité nationales chez nos
politiciens a engendré un effet bien pervers. Quand on a
défendu ses droits, de façon purement verbale, et que
survient l’échec, on se félicite de «s’être battu», mais
c’est pour mieux plier l’échine, agiter l’unifolié et
entonner tous en choeur le «ô Canada!». C’est ainsi que
les fédéralistes québécois qui ont échoué complètement
dans leur tentative de renouvellement du Canada, qui ont
essuyé un refus total de reconnaissance de la «société
distincte», font encore semblant de croire à l’avenir du
Québec et du Canada français au sein de la fédération
canadienne.

Au lendemain d’un échec
de la cause de Montfort, les Franco-ontariens vont-ils
rentrer dans le rang, reprofesser une foi canadienne
indéfectible, prendre parti contre l’indépendance du
Québec? Ou bien, apprendront-ils enfin l’éloquence de la
réserve, du silence, la force et l’efficacité de la
solidarité nationale qui les lie au Québec et non au Canada
anglais, le sens d’une lutte et d’une détermination qui
invente des moyens nouveaux, quand les recettes du passé ont
fait échec? Si la cause de Montfort devait être défaite,
le peuple de l’Ontario français devrait en sortir grandi par
une conscience exacte de sa situation réelle. Il devrait
trouver dans l’échec même la conviction salutaire qu’il
faut abandonner les hommes et les méthodes de l’échec et
inventer un nouveau nationalisme conforme à la vérité et
à l’exigence de sa survie et de son affirmation.


Nous avons besoin de vous

Contribuez à Impératif français en faisant un don ou en devenant membre !