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L’HYPOCRISIE DU BILINGUISME

L’HYPOCRISIE DU
BILINGUISME

Dans l’AGORA et l’Action NATIONALE,
Jean-Paul Perreault a mis en lumière l’hypocrisie du bilinguisme
de la fonction publique fédérale dans la région de la capitale
dite nationale. S’appuyant sur le rapport annuel du Commissaire
aux langues officielles de 1994, celui du 25e anniversaire de
l’entrée en vigueur de la Loi, le Président d’Impératif
français a signalé que les affaires à la Marcel Chaput, que la
Loi devait faire disparaître définitivement, s’étaient
multipliées ces dernières années. La palme, écrivait-il,
revenait au ministère de la Défense nationale. Mais,
ajoutait-il, le ministère des Affaires étrangères et du
Commerce international n’était pas en reste, lui qui se targue
de refléter à l’étranger la dualité linguistique du Canada.
Inscrite en Cour fédérale depuis le 19 août 1994, cette cause
à la Marcel Chaput contre les Affaires étrangères embarrassait
l’ex-ministre André Ouellet. à tel point qu’il invoquait le sub
judice pour ne pas répondre aux questions de l’Opposition, même
si son ministère n’a pas encore présenté sa défense. En fait,
l’ex-ministre n’osait pas avouer qu’un de ses collègues d’alors
au gouvernement, l’honorable Marcel Massé, a amendé la Loi par
simple voie administrative, à l’insu et au mépris du Parlement,
pendant qu’il était Sous-secrétaire d’état aux Affaires
extérieures.

Pesant ses mots avec une balance pour oeufs
de mouches, le ministère a invoqué à sa décharge une série
de directives et de circulaires administratives de 1978, 1983 et
1984. Par une distinction jésuitique qui le caractérise, il
reconnaissait d’une part que ses fonctionnaires avaient le droit
de travailler dans la langue officielle de leur choix lorsqu’ils
étaient à l’étranger, et d’être supervisés dans cette
langue. Puis il leur retirait la faculté de s’en prévaloir et
de l’invoquer, rendant ainsi la Loi inopérante. La politique du
Ministère , écrivait un de ses hauts fonctionnaires, stipulait
et continue de stipuler que les employés en poste à l’étranger
peuvent travailler dans la langue officielle de leur choix .
(Tiens, c’est du nouveau! Ce n’est pas la Loi qui accorde ce
droit, mais la politique du ministère qui le permet. Le
ministère se réserverait-il, par hasard, le pouvoir d’avoir une
politique linguistique différente de celle qui est prévue par
la Loi ?) Mais… les services ne seraient pas tous
nécessairement disponibles dans les deux langues officielles, et
leur accès serait subordonné à l’importance, au lieu
géographique et à la composition linguistique du personnel de
la mission…et les fonctionnaires qui sont affectés à un tel
bureau devraient alors être informés de ce que toutes les
tâches internes reliées au travail, y compris la surveillance,
devront être exécutées dans une seule langue officielle . On
ne peut pas être plus clair. Le ministère a jeté à la
poubelle les parties de la Loi qui ne faisaient pas son affaire.

Par ailleurs, la brochure de 1984,
intitulée Les langues officielles et vous, à laquelle
il se référait, admettait en outre à mots couverts que nombre
de chefs de missions à l’étranger ne se conformaient pas aux
exigences de la Loi en matière de bilinguisme pour occuper leurs
fonctions. Mais le passage le plus significatif de ce document en
était son avant-propos endossé au plus haut niveau: il était
signé par le Sous-secrétaire d’état aux Affaires extérieures
d’alors, Marcel Massé, le même qui vient d’être nommé
Président du Conseil du Trésor, le ministère chargé de la
mise en oeuvre de la Loi sur les langues officielles. Ce
ministre, à l’époque le plus haut fonctionnaire des Affaires
extérieures, s’appuyait lui aussi sur la politique du
gouvernement, et non sur la Loi:

En vertu de la politique adoptée par le
gouvernement en matière de langues officielles écrivait-il, le
Ministère est tenu de respecter le principe de l’égalité
statutaire du français et de l’anglais, tant comme langues de
service que comme langue de travail . Puis le reste du document
expliquait comment le ministère limitait l’égalité statutaire
des deux langues lorsque ses fonctionnaires étaient à
l’étranger, voire les empêchait de se prévaloir des
dispositions de la Loi. Quand on sait qu’aucun chef de mission
francophone n’est unilingue français, on comprend très bien que
le ministère a plié devant ses chefs de missions unilingues
anglophones qui ont toujours refusé de se conformer à la Loi.

Comment le ministre maintenant chargé de
l’administration de la Loi sur les langues officielles peut-il
avoir osé affirmer à plusieurs reprises pendant la campagne
référendaire que le français avait fait des progrès au Canada
ces dernières années, alors que les affaires à la Marcel
Chaput se sont multipliées et que le ministère dont il avait
l’administration en 1984 a amendé la Loi sur les langues
officielles à l’insu et au mépris du Parlement ?

L.-Hubert Leduc
Aylmer (Québec)


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