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L’HUMILIATION DES FRANCOPHONES RÉSIDANT DANS LA CAPITALE CANADIENNE

L’HUMILIATION DES FRANCOPHONES RéSIDANT DANS LA CAPITALE CANADIENNE

Penchons-nous sur la situation de la francophonie à Ottawa et dans le reste
d’Ottawa-Carleton (O-C). Ottawa est avant tout le siège de la capitale d’un pays
officiellement bilingue. De plus, les villes d’Ottawa et de Hull ont demandé et obtenu
les Jeux de la francophonie en 2001 et Ottawa aura d’ailleurs la part du lion dans
l’organisation de ces jeux.

Dans la municipalité régionale d’Ottawa-Carleton, il y a au moins 140,000 francophones
(sur 709,000 h) selon le recensement de 1996. Si l’on tient compte du fait que certains
allophones francophiles habitent à Ottawa et que certains enfants nés de « couples
mixtes » ne comptent pas comme francophones, on pourrait estimer que les francophones ne
représentent pas seulement 20 p.100 de la population, mais bien plutôt près de 25
p.100.

Ottawa-Carleton (O-C) se vante d’être bilingue. Pourtant, dans cette région urbaine qui
se veut la capitale du pays, voisine du territoire québécois, le français recule à
toute allure et sur plusieurs fronts. D’abord, les chiffres du dernier recensement
indiquent un taux d’assimilation de 24,6 p.100. Mais il y a plus que cela. Les
francophones ne cessent de se faire rappeler (en particulier depuis quelques années) que
leur langue en est une parmi une multitude d’autres. Voici mes réflexions sur les
services de santé, le CRTC, les administrations publiques locales, les comptoirs de
vidéos et l’affichage.

Les services de santé dans la capitale :

1. En 1996, un comité de restructuration des services de santé mis sur pied par le
gouvernement Harris ajoutait machinalement Montfort, le seul hôpital francophone de
l’Ontario, à sa liste des fermetures possibles d’hôpitaux. Les francophones se sont
littéralement soulevés. Cette histoire a vite fait le tour du pays. On connaît la
suite. Jusqu’ici, Montfort n’est pas fermé mais son budget a été considérablement
diminué et ses administrateurs se battent pour ramasser des miettes.

2. La ministre de la Santé de l’Ontario a mis sur pied au début de 1998 le Conseil de
santé de Champlain pour gérer les hôpitaux de l’Est ontarien. Le gouvernement Harris en
a nommé les conseillers. La représentation francophone y laisse pour le moins à
désirer : 1 sur 21.

La trahison des francophones d’Ottawa par le CRTC:

1. Depuis 1995, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommuni cations du Canada
(CRTC) a approuvé des permis à deux télédiffuseurs indépendants de Toronto (CFMT et
CITY), un d’Hamilton (CHCH) et l’autre de Pembroke (CHRO) pour des fréquences locales
dans notre région. Il est à noter que ces télédiffuseurs, ne produisent pas
d’émissions à Ottawa; ils n’ont que des émetteurs qui diffusent simultanément la même
programmation à Ottawa et dans les villes d’origine. CFMT est un service multilingue mais
le quart de ses émissions est en anglais et provient exclusivement des é-U. Les autres
télédiffuseurs sus-mentionnés importent les 3/4 de leur programmation des é-U. Les
câblodistributeurs de l’Est ontarien et de l’Outaouais québécois captent et offrent
maintenant ces «signaux locaux» à leurs abonnés. Cette plus grande disponibilité de
services de télé américanisés noient les services en français et contribuent à
l’érosion du marché francophone.

2. En automne 1997, le câblodistributeur de la région d’O-C, Rogers Cablesystems, a
ajouté une douzaine de nouvelles chaînes télé à sa grille de services. Toutefois, on
n’y retrouve aucun des quatre nouveaux services de langue française ayant entré en ondes
en automne 1997. Pour faire de la place aux nouvelles stations, le câblo a même laissé
tomber Superécran. De plus, le déplacement de Télé-Québec du canal 63 à 70 prive
bien des abonnés francophones et francophiles de cette chaîne si leur syntonisateur est
limité à 69 canaux ou moins.

Ce choix de services est dû à l’absence de réglementation du CRTC sur les canaux
spécialisés. Voici pourquoi : les câblodistributeurs ne sont tenus de fournir des
services de télé spécialisés que dans la langue de la majorité. Avec tant de
latitude, les câblodistributeurs peuvent ignorer les canaux français spécialisés (le
Canal ‘D’, TéléToon-F (français), le Canal-Vie, TVA-Nouvelles, et Musi-Max) dans les
régions bilingues où les francophones représentent 15 à 49 p.100 de la population.
C’est ce qui est arrivé ici en pleine capitale du pays à une population francophone qui
formerait la quatrième agglomération du Québec ! Pourquoi ? Parce que le CRTC traite
Ottawa-Carleton comme une zone unilingue anglophone, sans compromis. Notons que du côté
québécois, le câblodistributeur (Vidéotron) a inséré à son menu neuf nouveaux
canaux, dont cinq en anglais.

La place du français dans les administrations publiques locales:

1. Le directeur des services de police de la MROC et le premier directeur adjoint sont
unilingues. Pourtant, la commission de police a cru bon engager un deuxième directeur
adjoint unilingue en février 1998. « Jamais deux sans trois » comme le dit le dicton.
ça fait trois unilingues sur trois.

2. à Cumberland, «banlieue» bilingue de l’est de la région d’O-C, francophone à plus
de 40 p.100, les services en français ne sont plus une priorité. Deux raisons : les
compressions du gouvernement provincial et le fait que les francophones soient bilingues.
On n’a qu’à fréquenter les arénas ou à consulter les publications distribuées au
public (Le Droit, 23 février 1998) pour le constater.

Les cassettes vidéo en français : presque impossibles à trouver dans la capitale du
Canada

Si on allait faire un tour chez un dépanneur de l’est d’Ottawa, autrement dit dans les
banlieues bilingues, il est pratiquement impossible de louer des vidéos en français.
Comparons un Quickie à Orléans en Ontario (0 cassette en français) et un Quickie situé
à Aylmer ou à Hull. Est-ce que quelqu’un a déjà remarqué le pourcentage de cassettes
en anglais du côté québécois dans la même chaîne de dépanneurs (en fait, tous les
dépanneurs ; pas seulement Quickie)?

Pour acheter un vidéo en français, il faut aussi chercher. Juste avant Noël 1996, je
cherchais une cassette vidéo de Walt Disney pour mes enfants. Une vendeuse chez Zellers
(Ch Cyrville) m’a juré dur comme fer que ces films-là n’existaient même pas en version
française et qu’il était inutile de continuer à chercher, que j’avais besoin de revenir
sur terre, etc, etc. Du côté québécois, toujours chez Zellers, la situation est loin
d’être réciproque. Il y a un bon choix de cassettes en français, mais la variété de
cassettes en anglais y est nettement plus grande.

L’affichage dans la capitale du pays:

Je prie les habitants de n’importe où au Canada ou dans le reste du monde de venir
constater la situation. Dans les Loblaws, les Zellers et les autres chaînes commerciales
de l’est d’Ottawa et dans les « banlieues dites bilingues », l’affichage unilingue est
de rigueur. Pourtant, on se scandalise ici des lois québécoises prévoyant la
prédominance du français dans l’affichage.

Conclusion

Les francophones de l’extérieur du Québec reçoivent des coups et tendent l’autre joue.
Les francos de la capitale ne font pas exception. Il y a toutes sortes de raisons pour ne
pas essayer de se défendre. Se battre constamment pour faire reconnaître sa langue,
c’est déprimant et lassant à la longue.

C’est à se demander s’il restera encore du français à Ottawa en 2001 pour accueillir
les participants aux jeux de la francophonie.

Raynald C.
Orléans (Ontario)


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