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LE « FRANGLAIS » SERAIT UN ENRICHISSEMENT

LE « FRANGLAIS » SERAIT UN ENRICHISSEMENT

France Pilon
LeDroit
20 janvier 1999

Une sociolinguiste de l’Université d’Ottawasoutient que l’emprunt de mots anglais chez les francophones de

l’Outaouais et de l’Est ontarien n’est pas une menace à la langue française. Parler un français truffé d’anglicismes ne conduit pas forcément à l’assimilation, avance Mme Shena Poplack qui étudie cette question controversée depuis 16 ans. L’étude de Mme Poplack, présentée hier dans le cadre des Rendez-vous du Centre de civilisation canadienne-française, a porté sur 120 résidents francophones des deux côtés de la rivière. Mme Poplack voulait savoir si l’utilisation de mots anglais chez les francophones de l’Ouest québécois et de l’Est ontarien et l’emploi de structures grammaticales copiées sur l’anglais favoriseraient la simplification voire la disparition du français parlé par la minorité.

Or l’étude tend à démontrer que ce n’est pas le cas. Mme Poplack soutient même que «l’anglais ajoute plus qu’il n’enlève au français».

Au cours des entrevues exhaustives effectuées auprès des 120 francophones, Mme Poplack a compilé plus de 3,5 millions de mots. Or seulement 20 000 de ces mots sont des mots anglais, soit moins de 1 pour cent.

Si les francophones passent du français à l’anglais au milieu d’une phrase c’est parce souvent ils veulent mettre plus d’emphase, produire un effet rhétorique, a indiqué Mme Poplack. Quand ils utilisent des mots anglais comme «afforder, checker, brainwasher, déplugger, tougher ou watcher», ils les prononcent à la française et ces mots sont désormais perçus comme des mots français.

Quant aux mauvaises constructions grammaticales, genre «si j’aurais été capable, j’aurais resté» qu’ont dit influencées de l’anglais, on en retrouve dans des bouquins français publiés depuis au moins l’an 1600, a indiqué Mme Poplack.

Il y a toutefois des différences entre francophones québécois et ceux de l’Est ontarien. Ceux qui habitent le Mont-Bleu par exemple utilisent moins de mots anglais dans leurs conversation que ceux qui habitent la basse ville d’Ottawa, de préciser le professeur.

Ses recherches ne sont pas sans susciter des controverses. Le linguiste Charles Castonguay, qui assistait à la présentation de l’étude, soutient qu’en éliminant au départ les francophones qui parlaient peu français, les résultats peuvent être faussés. Mme Poplack a indiqué que les francophones qui ne pouvaient pas soutenir une conversation en français ont été écartés de l’échantillonnage.

M. Castonguay soutient que le contact des deux langues comporte un danger, soit l’érosion graduel du français et l’assimilation.

Michel Sara-Bournet, un historien, trouve exagérée l’assertion que les emprunts à l’anglais deviennent du français. Les francophones qui utilisent alternativement le français et l’anglais sont des personnes qui ne parlent aucune des deux langues convenablement, dit-il.

Mme Poplack réplique que « ça peut être un français que vous n’aimez pas mais ce n’est pas un problème de français». Elle ajoute que «pour assurer la survie d’une langue, il faut la laisser parler même avec ses défauts».

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P.-S. N’hésitez pas à faire parvenir vos commentaires à :
Madame Shena Poplack
Université d’Ottawa
Adrélec : sxpaf@uottawa.ca
Tél. : (613) 562-5800, poste 1764

Et une copie conforme à :
Imperatif@imperatif-francais.org

Les réactions aux propos de Mme Poplack n’ont pas tardé à venir :

LE « FRANGLAIS » : UN PATOIS, UN DIALECTE…

UNE ÉTUDE PAS SÉRIEUSE…


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