Lucien Bouchard: un sphinx sans énigme
L’homme fascine et rebute du même coup. Peu de carrières furent aussi riches que la sienne en faveur populaire, en postes divers et importants, en feintes de retraite et en retours imprévus. Et pourtant, un relent d’échec colle à ses abandons, à ses rebonds, une ambiguïté foncière paralyse un parcours nerveux et rempli de contradictions.
Habile en l’art de servir deux maîtres, il est passé du fédéralisme à l’indépendance et, un moment, a cristallisé sur sa personne l’espoir que le Québec aurait enfin trouvé le héros de sa cause. Que non! Au moment où son poste de premier ministre lui permettait d’approcher l’indépendance, ce point focal de notre histoire, il se défile et abandonne le chantier sous des prétextes bien légers. Il n’aurait pas réussi à ranimer la flamme nationale, sans doute parce que lui-même manquait de ce feu. Pour masquer sa fuite, Il n’hésite pas à calomnier d’antisémitisme Yves Michaud, attachant à celui-ci un soupçon aussi infamant que durable.
Lucien Bouchard cède toujours à la fascination du pouvoir dominant. Toucher à l’ordre fédéral l’a fait vaciller dans ses convictions. Comme la femme de Loth, il n’a pu cacher en lui cette statue de sel qui regarde vers Ottawa. Si la haute finance lui fait signe, il ne peut résister aux gaz de schiste qui lui paraissent le destin même du Québec.
Hubert Larocque, Gatineau.