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LA CONQUÊTE TOUJOURS VIVANTE

La parole n’est pas le pouvoir mais elle l’entrave, l’infléchit, le juge et souvent lui survit. Tout État tente donc de mettre la main sur elle pour la rendre complice de ses desseins. Le battage sur l’anniversaire de la Conquête de 1759 en donne une illustration éclairante.

Qui le niera? Il existe un subconscient collectif qui encadre et amplifie le subconscient individuel. Depuis Michelet, la nation n’est-elle pas ” une âme et une personne “?

La Conquête a détourné notre territoire et nous a imposé un maître étranger. Depuis, rien ne doit gêner la volonté et les intérêts du Conquérant et de ses ayants droit successifs. Même les indépendantistes se soumettent à cette loi. Pourquoi éprouveraient-ils le besoin pathologique de condamner la violence si ce n’est pour assurer de leur obéissance le Maître? En effet, Lui seul peut exercer la violence en tout droit et toute impunité. La Conquête ne fut-elle pas une violence dont les effets sont bien plus durables et plus profonds que le terrorisme d’opérette du FLQ? C’est que la violence continue la politique par d’autres moyens. Presque tous les États commencent et se continuent par elle. La ” Loi des mesures de guerre ” n’excluait aucun moyen, même les plus sanglants. Une seule question, proprement politique, détermine l’usage ou le refus de la violence : ” Quelle est l’importance de l’enjeu et quelles sont les chances de réussir par cette voie? “

Le Gouvernement Charest, lui aussi, n’échappe pas à la même loi. Il ne peut regarder fixement la Conquête car c’est elle qui fonde et perpétue le “fédéralisme “. Aussi procède-t-il à une substitution qui le justifie et lui évite la gêne d’une interrogation fondamentale. La Conquête, dit le subconscient, c’est la violence. En toute connaissance de cause, M. Charest répond : ” Non, c’est le FLQ!”

Se pourrait-il que le Moulin de la Parole soit lui-même frappé? Bien entendu, notre histoire, après 1759, est enfermée dans la subtile et tentaculaire arborescence de la Conquête. Pourtant, on aurait pu parler de la bataille des Plaines d’Abraham sans la neutraliser par un flux de textes à tendances contradictoires. Comment plaire à la fois à ceux qui se sentent vaincus, et aux autres qui approuvent et célèbrent la Conquête?

Hubert Larocque, Gatineau.

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